Au moment où s’ouvre le procès Joseph Kabila à la Haute Cour Militaire de la RDC, il nous faut dire que cette affaire est révélatrice de l’état du pouvoir actuel adoptant une vision cynique et pessimiste des relations entre les différentes figures emblématiques du pays. L’événement reste fort : un procès hors norme d’un ancien président qui a offert sur un plateau en or le pouvoir à son successeur, et en arrière-plan il y a toute cette nouvelle présidence déficitaire qui veut se payer Joseph Kabila. Pour n’importe quel citoyen congolais, ces avanies ne sont qu’un règlement de compte, une salissure qui rejaillit sur le pays au moment où les préoccupations existentielles du peuple congolais sont ailleurs. Avec ce procès de la honte, on touche aujourd’hui à l’absurdité totale du système politique actuel que l’on comprend bien quand il faut regarder le contexte politique actuel où les congolais ont les yeux rivés sur les différents accords de paix pour instaurer la stabilité et organiser un forum national inclusif que tous les patriotes souhaitent de tous leurs vœux.
Nous ne pouvons-nous arc-bouter sur la jurisprudence, mais il faut s’atteler à souligner que cette procédure branlante compromettra son efficacité au regard de plusieurs facteurs, faisceau d’indices. C’est d’ailleurs de la rigolade si l’on pense au désert de preuves. Quand on voit l’acte d’accusation concernant des faits passibles de la peine capitale, les congolais ne peuvent qu’être en état de sidération en se disant que cet élément clé retenu par le procureur militaire concernant le témoignage d’une conversation téléphonique entre Joseph Kabila et un haut responsable du M23 pose le problème de sa fiabilité. La procédure judiciaire est un travail très pointilleux qui se base sur des preuves irréfutables, matériellement incontestables. L’admissibilité d’une conversation téléphonique comme faisceau d’indices dépend de plusieurs facteurs notamment de son authenticité, de la manière dont elle a été obtenue.
Ce procès apporte un coup fatal contre la cohésion nationale et surtout les processus des accords de paix en vigueur. Quelle que soit la décision que cette haute cour militaire prendra, elle est d’ores et déjà prise au piège du battage politique et de la dynamique actuelle des rapports de force. Joseph Kabila pourra bien surfer sur le contexte socio-politique du pays en revenant en selle de manière incontournable dans le nouveau paysage politique de la RDC. In fine ce procès est d’autant plus pernicieux qu’il s’inscrit dans un climat de morosité politique et de marasme économique où les citoyens congolais sont très déçus de la présidence actuelle qui n’améliore pas le train de vie des médecins, fonctionnaires, militaires et policiers congolais au moment où les grandes institutions de l’Etat ne font aucun effort substantiel pour réduire leur voilure. Si l’histoire semble être écrite pour les tenants du pouvoir quant à l’issue de ce procès, rien ne garantit leur survie politique d’ici quelques mois ou deux ans. Certains seront à leur tour poursuivis demain pour leurs crimes politiques, économiques ou biens mal acquis.
Le MDW de la semaine dernière s’était terminé sans une conclusion sur l’économie politique de la guerre de l’est du Congo. Aujourd’hui, nous allons poursuivre notre analyse et tirer une conclusion. Nous avions parlé du Rwanda, de l’Ouganda, et des USA comme acteurs externes d’une part, et des groupes rebelles AFC/M23 et du gouvernement congolais comme protagonistes intérieurs, d’autre part. Dans la suite de ce texte, nous voulons énumérer de manière plus ou moins exhaustive les autres bénéficiaires de la guerre dans l’est du Congo. Parmi les protagonistes externes nous allons parler brièvement du Burundi ainsi que des fabricants d’armes et de munitions qui engrangent des bénéfices énormes sur les cadavres des humains. En conclusion, nous parlerons d’un protagoniste spécial, le peuple congolais. Ce peuple, meurtri à cause entre autre de son apathie, porte une grande partie de responsabilité dans ce qui n’arrive pas en RDC, la paix sociale.
Le Burundi
Ce pays voisin du Congo est le seul qui entretient des relations cordiales avec Kinshasa et cela pour deux raisons stratégiques : Premièrement, le Burundi qui est en froid avec le Rwanda ne voudrait pas de la présence des rebelles congolais alliés à Kigali a sa frontière avec la RDC. C’est ainsi que plusieurs bataillons de l’armée Burundaise ont pris part à la guerre et ont défendu la ville frontalière d’Uvira.
En second lieu, la raison de l’implication du Burundi dans la guerre congolaise, est de freiner ou d’empêcher les appétits territoriaux et minéraux du Rwanda, son ennemi juré. Il est bon de savoir que les deux pays partagent la même démographie.
Au Rwanda comme au Burundi il y a une majorité Hutu et une minorité Tutsi et Twa. Cependant, au Rwanda ce sont les Tutsi qui sont au pouvoir, a la faveur du génocide de Tutsi de 1994 alors qu’au Burundi c’est la majorité Hutu qui est au pouvoir. L’ennemi de mon ennemi est mon ami, c’est le cas du Burundi aujourd’hui dans la guerre du Congo.
Les fabricants d’armes
Le marché d’arme et des munitions est un des plus florissant au monde. Les pays producteurs d’armes et des minutions, ainsi que des intermédiaires commerciaux bénéficient de toutes les guerres et de la guerre du Congo en particulier.
Notre hypothèse est que la guerre du Congo prendra fin lorsque ceux qui en bénéficient peuvent obtenir les mêmes bénéfices en temps de paix. Pour les marchands d’armes, la paix est un mauvais marché. Il y a un an, j’étais invité à Kampala pour parler de migration forcée (forced migration) a une poignée d’activistes ougandais.
Dans mon discours, j’ai fait allusion au fait que les fabricants d’armes qui équipaient les belligérants finançaient en même temps la rencontre sur la migration forcée. Ce type d’hypocrisie avait sauté aux yeux du monde lorsque la Suède s’était montrée très généreuse pour accueillir les iraquiens qui fuyaient la guerre chez eux. Mais, un des premiers fournisseurs d’armes en Irak était bien la Suède.
Celle-ci accueillait à bras ouverts des irakiens qui fuyaient pour ne pas mourir des balles suédoises. Selon les données de l’Institut International de recherche sur la paix de Stockholm, le plus grand vendeur d’armes dans le monde est les Etats Unis d’Amérique suivi de la France et de la Russie.
L’Amérique est à la fois le plus grand vendeur d’armes dans le monde et médiateur de la paix entre le Congo et le Rwanda. Dans les Etats Unis de “American First” la proposition des vendeurs d’armes américains à une précédence sur une négociation de paix entre des belligérants des pays de Grands Lacs africains.
La contraposée de cette proposition est que s'il y a la paix, les armes ne seront pas vendues et il n’y aura donc plus de profit pour le grand Amérique capitaliste. Rappelons-nous qu’aujourd’hui, le profit est devenu l’horizon indépassable de l’activité humaine. Le profit n’est jamais remis en question même si dans son déploiement il faille éliminer sans pitié des vies humaines. C’est dans cette perspective que la guerre fait partie du développement du capitalisme.
Le champ de bataille est la condition de possibilité de la production dans des usines. L’usage et la destruction des armes pendant la guerre permettent d’en fabriquer davantage. Ces grands principes moraux ne sont pas remis en question par la majorité du monde.
Le citoyen américain moyen ne sait même pas situer le Congo sur une carte géographique, mais il utilise les terres rares de cette région du monde pour conserver le standard de sa vie. Les terres rares congolaises seront utilisées en Amérique alors que les Congolais vont perdre leur souveraineté face au Rwanda, un pays dix fois plus petit que le grand Congo. Parlons enfin de la population Congolaise.
Les Congolais
La population Congolaise, comme tout le peuple du monde possède ce que d’aucuns appellent “le génie du peuple” ; Il l’a démontré à travers son histoire lointaine et contemporaine. Des luttes d’Independence avaient surpris les colons belges habitués à des congolais obéissants. Le départ de Mobutu était aussi l’œuvre du peuple Congolais, le départ du pouvoir de Joseph Kabila était aussi l’œuvre du peuple Congolais.
Il est vrai que ce peuple manifeste une apathie surprenante de nos jours alors qu’il a élu celui à qui il pensait remettre son destin, Martin Fayulu, mais monsieur Joseph Kabila en a décidé autrement en se moquant du “génie du peuple” congolais. Les Congolais et la société congolaise d’aujourd’hui vivent des problèmes plus structuraux qui minent la nation toute entière. Le pays s’est accommodé d’un partage différentiel inacceptable des deniers publics. Les Congolais ont normalisé le fait qu’une poignée d’individus s’accapare des ressources du pays au détriment de la grande majorité.
Pourquoi les Congolais acceptent-ils que leurs Vice-Premiers Ministres prennent du trésor public 45.000$ le mois alors que l’infirmière ou l’enseignant ne prennent que 100$ ou 82 $ le mois ? Au nom de quoi les Congolais, intellectuels, pères et mères de familles, ouvriers, enseignants, jeunes et moins jeunes – acceptent-ils cet état de chose ?
Quand se lèveront-il pour réclamer leur pays contre les prédateurs nationaux ?
(Par Me Joël Baruani Nyembo, Avocat près les Cours d’Appel de Kinshasa/Matete et du Lualaba ONA 17501)
Introduction
L’économie numérique, marquée par la prolifération des plateformes collaboratives telles qu'Uber, Glovo, ou encore des applications de freelance, bouleverse profondément les formes classiques de relations de travail. En République Démocratique du Congo (RDC), ce phénomène prend de l’ampleur sans cadre juridique spécifique, exposant les travailleurs à une précarité croissante.
L’enjeu central réside dans la requalification des relations de travail : ces travailleurs sont-ils de simples prestataires indépendants ou devraient-ils être reconnus comme salariés bénéficiant de la protection du Code du travail ?
Cet article interroge l’aptitude du Code du travail congolais de 2002 à encadrer ces nouvelles formes d'emploi, tout en proposant des pistes de réforme inspirées des pratiques belges et françaises.
L’encadrement juridique des relations de travail face aux plateformes numériques en RDC
En droit congolais, l’article 6 du Code du travail de 2002 définit le contrat de travail comme « une convention par laquelle une personne s’engage à mettre son activité professionnelle moyennant une rémunération sous la direction et l’autorité d’une autre personne ». Ce critère de lien de subordination reste déterminant.
Or, dans les plateformes numériques, la frontière est floue : les travailleurs (chauffeurs, livreurs, indépendants du numérique) utilisent leur propre matériel, organisent leur temps, mais restent soumis aux algorithmes, aux sanctions automatiques, aux notations, et aux directives des plateformes. La jurisprudence congolaise reste encore silencieuse sur cette problématique, contrairement à d'autres pays.
Les failles du Code du travail congolais de 2002 face aux nouvelles formes d’emploi
Le Code congolais du Travail, bien qu'encore fonctionnel, a vieilli et est inadapté aux dynamiques actuelles du marché du travail. Parmi ses faiblesses :
- Aucune reconnaissance du travail indépendant dépendant (ex. : autoentrepreneur lié économiquement à une plateforme). - Absence de statut hybride entre salarié et indépendant. - Faibles garanties sociales pour les travailleurs non reconnus comme salariés.
Ce vide juridique permet aux plateformes d’éviter leurs obligations sociales, fiscales et professionnelles, au détriment de la protection des travailleurs.
Réflexion comparative avec les standards belges et français
En France, la jurisprudence de la Cour de cassation (ex. arrêt Take Eat Easy, 2018) a déjà requalifié certains livreurs comme salariés, en se fondant sur l’existence d’un lien de subordination algorithmique.
En Belgique, plusieurs rapports plaident pour un statut intermédiaire et la mise en place de critères de requalification, notamment : la dépendance économique, le pouvoir disciplinaire de la plateforme, ou encore l’intégration du travailleur dans une organisation stable.
Ces États reconnaissent l’émergence de formes de subordination nouvelles et adaptent progressivement leur droit.
Propositions de réformes pour un droit du travail congolais modernisé
Voici quelques propositions concrètes pour réformer le Code du travail congolais :
- Modifier l’article 6 pour élargir la notion de subordination, en y intégrant le pouvoir de contrôle algorithmique et la dépendance économique. - Créer un nouveau statut juridique : celui du "travailleur de plateforme", avec des droits sociaux minimums (assurance maladie, sécurité sociale, rémunération minimale). - Établir des critères clairs de requalification par voie de décret ou jurisprudence. - Renforcer les missions de l’Inspection du travail en matière de plateformes numériques. - Instaurer une présomption de salariat lorsque certains indicateurs de subordination sont réunis, comme en Espagne ou en Californie.
Ces réformes rendraient le droit du travail congolais plus protecteur, plus flexible et plus attractif à l’échelle internationale.
Conclusion
L’économie numérique offre des opportunités, mais aussi de grands risques de précarisation si le droit ne suit pas. En RDC, l’enjeu de la requalification des travailleurs de plateforme est majeur : il s’agit de protéger des milliers de travailleurs tout en accompagnant l’innovation. Un Code du travail rénové, inspiré des pratiques européennes tout en étant adapté au contexte congolais, s’impose avec urgence.
Le juriste congolais, au croisement du droit social, du numérique et de la justice sociale, a un rôle central à jouer dans cette évolution.
o Bibliographie
Sources légales et réglementaires
- République Démocratique du Congo, Code du travail, Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002. - France, Code du travail, version consolidée 2024. - Belgique, Code du travail belge (extraits du droit social et économique), SPF Emploi.
Jurisprudence - Cour de cassation française, chambre sociale, arrêt du 28 novembre 2018, n° 17-20.079 (Take Eat Easy). - Tribunal du travail de Bruxelles, 2021, Jugement relatif à la requalification d’un travailleur Deliveroo. - Cour de justice de l’Union européenne, arrêt Uber Systems Spain, C-434/15, 20 décembre 2017.
Doctrine et rapports - Goudelin, A. (2020). Travailleurs des plateformes : entre indépendance et subordination. Dalloz Actualité. - Commission européenne (2021). Proposition de directive sur les travailleurs des plateformes numériques. - Ministère belge de l’Emploi (2022). Travail via plateformes numériques : analyse et recommandations. - Kayembe, J.-P. (2019). La modernisation du droit du travail en RDC : enjeux et perspectives, Revue congolaise du droit social, n°12.
(Par Emmanuel Ilunga Ngoie Kasongo, Ministre Délégué Honoraire aux Affaires Etrangères & Chargé des Congolais de l’étranger)
Monsieur le Président honoraire,
C’est avec un profond sentiment d’indignation et d’angoisse que je m’adresse à vous aujourd’hui. En tant qu’ancien Ministre Délégué aux Affaires Étrangères, en charge des Congolais de l’étranger, j’ai eu le privilège mais aussi la responsabilité de représenter notre peuple dans sa diversité et ses attentes.
Aujourd’hui, je ne peux rester silencieux face à votre provocation manifeste : votre récente visite à Goma, ville meurtrie, située au cœur d’une région toujours occupée par des ennemis de la République.
Votre présence dans cette zone hautement sensible, en pleine crise, est perçue par de nombreux compatriotes comme une gifle à la mémoire de nos ancêtres et un mépris pour le combat que mène actuellement notre peuple.
Après dix-huit années à la tête du pays, vous n’avez pas su, ou pas voulu, doter la République Démocratique du Congo d’une armée nationale forte, disciplinée, et réellement républicaine. Cette absence de volonté politique a permis l’infiltration de nos forces par des groupes aux agendas étrangers, mettant à nu votre échec à garantir la souveraineté de notre territoire.
Pire encore, votre silence prolongé face à cette situation tragique soulève des interrogations sérieuses : à qui avez-vous réellement servi pendant tout ce temps ? Comment pouvez-vous revendiquer un attachement sincère à la terre de nos ancêtres alors que vos actes ont si souvent contredit l’intérêt supérieur de la nation ?
Pendant l’exercice de mes fonctions ministérielles, j’ai été personnellement témoin des manipulations orchestrées autour du vote des Congolais de l’étranger. Les consignes données à Corneille Nangaa, alors président de la CENI, étaient explicites : empêcher l’enrôlement et la participation électorale de la diaspora.
Ce choix délibéré d’exclure des millions de voix critiques démontre à quel point votre régime craignait la transparence et la vérité des urnes. Cette démarche visait uniquement à fausser le jeu démocratique en faveur de votre candidat désigné, au détriment de la volonté populaire.
Heureusement, ces manœuvres ont été contrecarrées. Aujourd’hui, le Président Félix Tshisekedi incarne une nouvelle espérance, celle d’un Congo uni, souverain et tourné vers l’avenir. Face aux défis colossaux, il choisit la vérité, la transparence et le combat pour le bien commun, là où vous avez, trop souvent, opté pour l’opacité, les compromis douteux et la fuite en avant.
Le peuple congolais n’a pas oublié : la corruption systémique, la misère croissante, les élites prédatrices. Voilà l’héritage que vous laissez derrière vous. Et pourtant, au lieu de faire preuve d’humilité ou de silence responsable, vous réapparaissez dans des zones en guerre, comme si de rien n’était, tel un acteur oubliant les dégâts de son propre scénario.
La jeunesse congolaise, majoritaire et déterminée, attend autre chose. Elle réclame des dirigeants qui unissent au lieu de diviser, qui protègent au lieu d’exposer, qui bâtissent au lieu de manipuler.
C’est pourquoi, par cette lettre, je lance un appel solennel : que chaque patriote sincère se lève pour soutenir les efforts de redressement, de paix et de souveraineté entrepris par les institutions actuelles. Nous devons tourner la page des trahisons et des compromissions, et bâtir ensemble un Congo où la justice, la vérité et la prospérité sont des réalités partagées par tous.
Monsieur Kabila, si vous aimez encore ce pays, il est temps de le prouver autrement. Le Congo a besoin de bâtisseurs et non de touristes politiques en quête de réhabilitation personnelle.
Recevez, Monsieur Joseph Kabila Kabange, mes salutations les plus résolues et les plus vigilantes.
Alors que se multiplient les accords, pactes et déclarations dans la quête éperdue d’une paix durable en République Démocratique du Congo, Odéric Nyembo-ya-Lumbu Mutumbiwa, Président de l’Alliance Nationale pour la République (A.N.R.) et Coordonnateur des Tenants de la thèse du vide juridique, livre une tribune à haute portée analytique et juridique. A travers une lecture rigoureuse des textes nationaux et internationaux, il interroge la validité et la portée des initiatives récentes telles que le « Pacte Social » des Eglises, l’Accord de Doha ou encore l’Accord de Washington. Il démontre, arguments constitutionnels et conventionnels à l’appui, que seule l’architecture normative de l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba, signé en 2013 sous l’égide de l’Union Africaine et de l’ONU, offre à ce jour un fondement légal, contraignant et inclusif capable de restructurer l’État congolais en crise. Pour Odéric NYEMBO, toute autre voie n’est qu’un mirage diplomatique, sans force obligatoire ni légitimité. À l’heure des incertitudes et des impasses politiques, il appelle à une mobilisation nationale et internationale pour la mise en œuvre intégrale de ce traité, socle oublié mais indispensable à une paix véritable.
De l’insubmersible Accord-Cadre d’Addis-Abeba
Plusieurs initiatives, un seul point de chute : Addis-Abeba
INTRODUCTION
Voici des décennies qu’une crise aigüe, multidimensionnelle secoue la République Démocratique du Congo, notre pays. Dans ce cadre et en vue de mettre fin à ladite crise, intervenait à Addis-Abeba le 24 février 2013 la signature de l’Accord-Cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République Démocratique du Congo et la Région. Depuis lors, la crise s’aggrave et revêt, chaque jour qui passe, de nouvelles dimensions. Que d’initiatives, toutes ayant comme point focal : la recherche de la paix.
Notre intervention de ce jour s’intéresse plus particulièrement aux plus récentes d’entre elles et qui alimentent le débat politique, à savoir « Le Pacte Social pour la Paix et le Bien-Vivre Ensemble en RDC et dans les Grands Lacs » des Eglises Catholique et Protestante, l’Accord de Paix de Washington signé le 27 juin 2025, lui-même précédé d’un pré-accord présenté sous forme d’une déclaration conjointe sur les pourparlers de paix entre la République Démocratique du Congo et la République du Rwanda, sous la médiation des Etats-Unis et l’observation de l’Etat du Qatar intervenu le 18 juin 2025, les pourparlers de DOHA entre les représentants de la République Démocratique du Congo et ceux de l’Alliance du Fleuve Congo/Mouvement du 23 Mars (AFC/M23) qui n’ont pas encore abouti mais dont la déclaration conjointe du 23 avril 2025 faite séparément par les deux parties promet d’ « œuvrer à la conclusion d’une trêve devant permettre l’instauration d’un « cessez-le-feu effectif », la « cessation immédiate des hostilités, le rejet catégorique de tout discours de haine et d’intimidation … le respect des engagements précités qui ouvrira la voie à un dialogue constructif pour rétablir une paix durable en République Démocratique du Congo et dans la région. »
Que de points de vue divergents ! Alors que certains estiment avoir tout gagné dans la mesure où « l’accord […] consacre une avancée diplomatique majeure et un élan d’espoir pour le retour effectif de la paix et de la sécurité ainsi que du redressement socioéconomique de la RDC », d’autres par contre fustigent la tentation de réduire la responsabilité de la crise congolaise à un seul acteur extérieur, le Rwanda, en ignorant ainsi les causes internes telles que la mauvaise gouvernance, la corruption systémique et la faiblesse de l’autorité de l’Etat comme des maux qui contribuent à l’aggravation de la situation sécuritaire et sociale du pays. La même opinion épingle « la sous-traitance de la sécurisation du territoire national » à plusieurs forces et groupes armés non étatiques qui fait partie des causes profondes de la souffrance quotidienne du peuple Congolais. D’où, estime-t-elle la nécessité de commencer par les causes profondes internes en lieu et place de multiplier une série d’accords qu’elle juge léonins. (V. La Prospérité n° 6618 du mercredi 2 juillet 2025, Kinshasa, p. 2 ; l’Ouragan n° 266 du vendredi 27 juin 2025, Kinshasa, p. 5).
D’autres critiques plus acerbes ont tourné autour de la non prise en compte du principe de responsabilité par cet Accord donnant ainsi l’impression de se retrouver en face d’un Accord accordant une prime à l’agression, mettant la victime à genoux et contrainte d’aliéner son patrimoine national, sacrifiant la justice pour une paix précaire au point de penser qu’il est ni plus ni moins « un accord sans mémoire, ni justice, un marché de dupes », négligeant d’autres puissances régionales ainsi que « l’écheveau complexe des groupes armés dans la région des Grands Lacs ». (V. L’Ouragan n° 264 du vendredi 20 juin 2025, Kinshasa, p.3 ; La Prospérité n° 6618 du mercredi 2 juillet 2025, Kinshasa, p. 8 ; La Prospérité n° 6613 du mardi 24 juin 2025, Kinshasa, p.10 ; La Référence Plus n° 9475 du 24 juin 2025, Kinshasa, p.4).
Alors que les Eglises Catholique et Protestante voient en l’Accord de Washington « un début mais pas encore la fin » et réclament l’organisation d’un dialogue inclusif, les forces politiques et sociales déplorent le fait qu’ « étant parties au problème [le] pouvoir ne peut [pas] décider unilatéralement des conditions requises pour la solution au problème ».
Nous voici donc face à une inflation d’initiatives encouragées par les uns et critiquées par les autres, faisant parfois double emploi, se neutralisant et occasionnant ainsi une dispersion de moyens et d’efforts qui retarde chaque jour l’avènement de cette ère de paix tant recherchée.
Véritable tour de Babel où tout le monde appelle de tous ses vœux le dialogue sans que l’on n’en détermine ni la nature, ni ses modalités d’organisation, ni ses fondements juridiques … Plus grave encore, des problèmes de fond aussi importants que celui de l’interprétation de ces différents textes de nature aussi variée ne sont jamais posés : quels sont les rapports pouvant exister entre les différents textes ? Quelle est la place de l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba au milieu de ces textes ? L’Accord de Washington déroge-t-il à l’Accord-Cadre ? Quid de la nature des documents à sortir de DOHA ? … Les différents points d’interrogation soulevés par la majorité des intervenants tels que l’organisation d’un dialogue inclusif sans interférence du pouvoir, la prise en compte du principe de responsabilité pour ne pas donner une prime à la guerre, etc. ne trouvent-ils pas leur réponse dans l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba ?
Notre intervention tente de répondre à toutes ces interrogations.
I. DE LA QUESTION DU FONDEMENT JURIDIQUE.
Selon la loi de normativité enseignée par Hans KELSEN, constituant tout un système, les normes juridiques sont ordonnées et hiérarchisées formant une pyramide au sommet de laquelle trône la Constitution (V. NGUYA NDILA MALENGANA, Droit international public, Tome I, Introduction générale et sources. Notes polycopiées, Kinshasa, 2017, n° 43, p. 55).
C’est dire que dans le cadre de l’organisation et de l’exercice du pouvoir, toute initiative devrait être conforme à la Constitution.
Il résulte par conséquent de l’analyse des dispositions de la Constitution du 18 février 2006 que celle-ci ne prévoit nulle part le dialogue comme mode de résolution des conflits en R.D.C.
De ce constat découlent une série de questions : quelle serait la nature des décisions prises au cours de ce forum qu’organiseraient la CENCO et l’ECC ? Que dire de leur caractère contraignant ? Seraient-elles opposables à tous ? Si oui, sur base de quel texte juridique ?
Du Pacte Social pour la Paix et le Bien-Vivre Ensemble en R.D.C. et dans les Grands Lacs.
Les Eglises Catholique et Protestante recourent à cet effet à l’article 63 de la Constitution en vue de tenter de trouver un fondement juridique à leur initiative.
En effet, l’article 63 de la Constitution dispose en son alinéa 1er que « tout Congolais a le droit et le devoir sacré de défendre le pays et son intégrité territoriale face à une menace ou à une agression extérieure ».
En matière d’interprétation des textes la place des mots reste de la plus grande importance dans la compréhension des dispositions légales qui nous régissent. Il convient dès lors de noter que l’article ci-haut repris est prescrit dans le Titre II de la Constitution qui traite des droits humains, des libertés fondamentales et des devoirs du Citoyen et de l’Etat alors que la matière dont les Eglises Catholique et Protestante voudraient s’attribuer la compétence se rapporte à son Titre III qui traite, lui, de l’organisation et de l’exercice du pouvoir. Ce dernier titre pose clairement des règles et principes qui régissent la matière visée.
La référence faite à l’article 63 est donc inappropriée car, en effet, le problème posé ici concerne le mandat, l’habilitation, la compétence en matière d’organisation et d’exercice du pouvoir en R.D.C. A notre connaissance, notre Constitution ne reconnaît à ces deux Eglises aucune compétence en la matière.
Eu égard à cette faiblesse fondamentale qui mine le « Pacte Social », cette initiative risquerait d’entrer en concurrence avec d’autres textes déjà existants et pris dans le cadre de la résolution de la crise congolaise : Accord-Cadre d’Addis-Abeba dont les processus de Nairobi et de Luanda aujourd’hui intégrés dans l’Accord de Washington sont le prolongement, la résolution 2098 du Conseil de sécurité des Nations-Unies, la résolution 2773 qui, à son tour, eu égard au caractère d’indissociabilité qui caractérise les résolutions du Conseil de sécurité en matière de résolution des conflits (V. Gilbert GUILLAUME, Les grandes crises nationales et le droit, Editions du Seuil, Paris, 1994) n’est ni plus ni moins que le prolongement de la résolution 2098. Il suffit pour s’en convaincre de se poser la question de savoir quelle serait la place du Médiateur de l’Union Africaine dans le projet de la CENCO et de l’ECC.
L’initiative des Eglises Catholique et Protestante nourrit l’ambition d’apporter, grâce à « des réflexions scientifiques pluridisciplinaires », « des réponses holistiques aux causes profondes de la présente crise multidimensionnelle ». La démarche débouche nécessairement sur la nécessité de procéder à des réformes structurelles.
Or, le projet porté par le « Pacte social », selon les dires de ses initiateurs, n’est pas concurrentiel et devra se réaliser dans le strict respect de l’ordre constitutionnel existant. Tels ne sont pas l’esprit et la lettre de l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba, par exemple, qui poursuivant les mêmes objectifs décrète en son point 5, paragraphe 1er, dernier alinéa, la réforme structurelle des institutions de l’Etat.
Dans son interview parue dans Jeune Afrique le 3 juillet dernier, M. Massad BOULOS, Conseiller Spécial de Donald TRUMP dont on connaît le rôle qu’il joue dans le dossier Congo, parlant du dialogue n’exclut pas les réformes structurelles voire constitutionnelles « Nous voulons voir, déclare-t-il, une R.D.C. stable et une région des Grands Lacs stable elle aussi. Cela passe par la résolution des conflits internes via des réformes, qu’elles soient ‘’constitutionnelles’’ ou autres » (V. La Prospérité n° 6622 du mardi 8 juillet, Kinshasa, p. 10).
Au regard de l’éclairage apporté ci-haut on comprend la préoccupation du Président français qui, après la présentation de l’initiative du « Pacte social » par la délégation religieuse « a souhaité comprendre de quelle manière celle-ci envisagerait de s’aligner dans sa mise en œuvre, avec les processus régionaux (Nairobi-Luanda) conformément à la Résolution 2773 et à l’ordre constitutionnel et institutionnel en vigueur » (V. Africa News n° 2557 du mercredi 2 au jeudi 3 juillet 2025,Kinshasa, pp. 8 et 9).
Ne l’oublions pas, les processus de NAIROBI et de LUANDA ainsi que la résolution 2773 restent le prolongement de l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba à situer dans la logique de la recherche des voies et moyens en vue de répondre aux difficultés rencontrées par l’Accord-Cadre dans sa mise en œuvre.
Si le Président MACRON y est allé par une question sibylline, le Vice-Premier Ministre et ministre des Affaires Etrangères de la Belgique est allé tout droit au but : « Cette initiative doit être en mesure de convaincre singulièrement les autorités de Kinshasa, montrant ainsi à la face du monde qu’elle ne vise pas à renverser l’ordre constitutionnel et institutionnel en place » (V. Africa News du mercredi 2 au jeudi 3 juillet 2025, Kinshasa, p.9). La CENCO et l’ECC ont-elles convaincu les autorités de Kinshasa dont la première d’entre elles : le Président de la République ? Dieu seul le sait.
Les Eglises Catholique et Protestante se félicitent de l’adoption par le Parlement européen de la Résolution RC-B10-0211/2025 qui au point 4 reconnaît « la contribution du « Pacte social » porté par les deux Eglises dans le processus de paix en R.D.C. et dans la région des Grands Lacs ». Attention ! Nous n’en sommes pas à une première reconnaissance par la Communauté internationale des initiatives portées par l’Eglise catholique en R.D.C. Souvenons-nous de la Résolution 2348 en vue d’appuyer l’accord de la Saint Sylvestre, reconnu par la Communauté internationale comme l’unique source de légitimité pendant la période considérée. Mgr UTEMBI, Archevêque de Kisangani et Président de la CENCO d’alors, a dû, malgré l’existence d’une telle résolution, jeter l’éponge, ramenant ainsi à la vie un pouvoir qui se retrouvait déjà en salle de réanimation.
En exhortant dans une phraséologie bien agencée, le Chef de l’Etat, en sa qualité de Représentant de la Nation et du symbole de l’unité nationale « à engager le pays dans un « Dialogue National » conformément à la Résolution 2773 du Conseil de sécurité des Nations-Unies et aux dispositions de l’article 69 de la Constitution du 18 février 2006, les pères spirituels, initiateurs du Pacte Social, se sont mis en porte-à-faux non seulement à tous les instruments juridiques internationaux relatifs à la crise congolaise qui laissent la compétence de fixer les modalités d’organisation du dialogue à la Communauté internationale, mais aussi à la position défendue par les forces politiques et sociales pro-Pacte social qui estiment que le pouvoir « étant partie au problème […] ne peut décider unilatéralement des conditions requises pour la solution du problème (V. Africa News n° 2557 du mercredi 2 au jeudi 3 juillet 2025, p.9. FORUM DES AS n° 7456 du lundi 14 juillet 2025, p.3).
La référence à l’article 69 de la Constitution condamne davantage la démarche de nos pères spirituels dans la mesure où la même disposition proclame dans son dernier alinéa in fine que le Président de la République est garant du respect des traités et accords internationaux.
DE L’INITIATIVE DE DOHA
Comme nous l’avons précédemment indiqué les normes juridiques sont ordonnées et hiérarchisées et forment ainsi une pyramide dont le sommet est occupé par la Constitution. Aussi, la validité des normes ainsi que leur force obligatoire s’apprécient-elles à l’aune de leur conformité à la Constitution.
La question devient davantage plus délicate lorsque l’on se retrouve dans le domaine des relations internationales tel que c’est le cas ici : en effet, le droit des traités emprunte une partie de ses règles au droit international public, une autre au droit interne et la question des rapports entre le traité et le droit interne s’est toujours posée avec acuité et résolue selon l’option levée par la Constitution de chaque Etat.
L’article 2.1a de la Convention de Vienne définit le traité comme « un accord international conclu par écrit entre Etats et régi par le droit international, qu’il soit consigné dans un instrument unique ou dans deux ou plusieurs instruments connexes, et quelle que soit sa dénomination particulière ».
De cette définition émergent les critères fondamentaux ci-après : un accord consacrant la manifestation de volontés convergentes imputables à des sujets de droit, un accord international relevant du droit international qui en détermine le régime, un accord liant les parties conformément au principe PACTA SUNT SERVANDA, enfin un accord unique formé de plusieurs instruments différents (V. Jean COMBACAU et Serge SUR, Droit international public, 12ème édition ; L.G.D.J., Paris, 2016, pp.79-80 …).
L’AFC/M23 n’est pas un Etat. Il n’est par conséquent pas un sujet de droit international.
Lorsqu’on remonte dans la nuit de l’histoire DOHA tire ses origines aussi bien du processus de Nairobi que de celui de Luanda, processus que le sommet conjoint de la Communauté d’Afrique de l’Est et de la SADC tenu le 8 février 2025 en Tanzanie a fusionnés au strict sens « d’améliorer la coordination, l’harmonisation et la complémentarité des deux processus » (Point 5 de la résolution 2773).
Les deux processus n’ont pas le même fondement juridique. En effet, alors que le processus de Nairobi trouve son fondement aussi bien dans l’accord de Goma intervenu en date du 23 mars 2009 entre le pouvoir de Kinshasa et le C.ND.P. du Général KUNDABATWARE en rébellion et dans les engagements ultérieurs pris par le pouvoir de Kinshasa, le processus de Luanda tire son fondement de l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba signé le 24 février2013, un traité international affichant l’ambition « de conduire un processus politique global ouvert à toutes les parties prenantes en vue de remédier aux causes profondes du conflit » (Point 4 in fine de la résolution 2098).
La conduite du processus politique global et inclusif menée aux assises d’Addis-Abeba par la Communauté internationale ayant été interrompue à la suite de diverses manœuvres orchestrées par une partie de la classe politique, partie prenante au processus, et le M23 ayant repris la guerre, il a été déclenché le processus de Luanda dont la responsabilité a été confiée au Président Angolais, l’objectif étant de permettre aux deux belligérants (M23 et pouvoir de Kinshasa) de régler leurs problèmes afin que soit organisé le dialogue sous l’empire de l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba.
C’est l’échec de LUANDA qui a donné naissance à DOHA, l’objectif étant resté le même : permettre aux belligérants de régler leurs problèmes afin que soit annoncé le dialogue.
L’objectif poursuivi par les deux processus étant cependant resté commun à savoir la recherche des voies et moyens en vue d’instaurer une paix durable par le dialogue, la nécessité de leur coordination s’est imposée.
Mais quelle serait la nature du document final de DOHA ? Un accord ? Si oui, quel sera son fondement juridique ? Quid de sa portée ? une simple déclaration ? Si oui quelle serait sa valeur juridique ? la réponse à toutes ces préoccupations nous permettra d’aligner le nouveau texte sur l’ensemble des textes existants poursuivant le même objectif.
A toutes ces questions, Me TUNDA Ya KASENDE donne un point de vue à partir duquel une réflexion pourrait être menée. S’appuyant sur sa thèse de doctorat Me TUNDA considère que du point de vue doctrinal « si un accord de paix interne est signé sous l’égide de la Communauté internationale, il peut être doté d’une valeur quasi-internationale, même s’il s’agit d’un accord entre un Etat et un groupe armé » (V. FORUM DES AS n° 7453 du mercredi 09 juillet 2025, Kinshasa, p.2).
Il est regrettable de constater que Me TUNDA ne donne aucune référence doctrinale pour appuyer ses affirmations. Sous réserve de ce qu’auront révélé nos recherches ultérieures, nous restons d’avis qu’en relations internationales à côté des traités internationaux véritables, il existe, selon la doctrine des « catégories de texte à portée juridique incertaine ».
Il est généralement rangé dans cette catégorie des textes à l’instar de l’Acte final d’Helsinki de 1975 sur la sécurité et la coopération en Europe, la Charte de Paris pour une nouvelle Europe de 1990, des déclarations conjointes, des communiqués de presse à la suite des rencontres internationales telle que la déclaration finale du premier sommet du G20 réuni en urgence à Washington le 15 novembre 2008 en réponse à la crise financière mondiale, etc.
Ces actes ne sont pas des traités ; ils constituent en principe de simples engagements moraux d’une « haute importance politique » (V. E. DECAUX, Droit international public, 7ème édition, Dalloz, Paris, 2010, n° 39, pp. 44-45 ; E. DECAUX, O. de FROUILLE, Droit international public, 11ème édition, Dalloz, Paris, 2018, n° 36, p. 45 ; P.M DUPUY, Y. KERBRAT, Droit international public, 13ème édition, Dalloz, Paris, 2016, n° 249, p.301).
C’est dire qu’il existe dans cette variété des textes une dualité normative : en effet, « à côté de l’ordre normatif structuré et plus ou moins formalisé par le droit » s’érige « un ordre de caractère non plus juridique mais politique ». Ainsi, peut-il exister plusieurs champs de normativité : politique, éthique, …
Mais la même doctrine attire notre attention sur le fait que la normativité politique traduit un phénomène, selon l’expression de DUPUY et KERBRAT, de « fuite devant le droit ». Fuite devant le droit, phénomène que Joe VERHOEVEN explicite en notant que « l’objectif est manifestement d’échapper au droit, en obtenant en dehors de lui une solution qui paraît difficilement acceptable si une sanction explicite lui est juridiquement conférée ».
Le choix de recourir à de telles techniques peut s’expliquer par exemple tout simplement par « le souci d’éviter les contrôles parlementaires auxquels est soumise la conclusion d’un traité ». (V. P.M. DUPUY, Y. KERBRAT, cit., pp. 301-302, n° 250 ; P.M. DUPUY, Y. KERBRAT, Droit international public, 14ème édition, Dalloz, Paris, 2018, p. 312, n° 250 ; J. VERHOEVEN, Droit international public, Editions Larcier, 2000, pp. 371-372).
On comprendra très aisément que le succès de telles pratiques dépend essentiellement de la BONNE FOI des parties. Lorsqu’on prend en compte les échecs enregistrés dans l’application de différents processus engagés en vue de la résolution de la crise congolaise, il est difficile d’affirmer que la BONNE FOI a toujours été au rendez-vous.
De ce qui précède les Tenants de la thèse du vide juridique, partie prenante aux assises hebdomadaires d’Addis-Abeba et défenseurs de l’Accord-Cadre considèrent le texte à produire à l’issue des négociations de DOHA comme un accord politique entre deux belligérants dont la valeur des clauses sera appréciée et jugée à l’aune de leur conformité à l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba, traité international conclu conformément à la Constitution congolaise du 18 février 2006.
DE L’ACCORD DE WASHINGTON
L’article 213 de la Constitution dispose que « Le Président de la République négocie et ratifie les traités et accords internationaux.
Le gouvernement conclut les accords internationaux non soumis à ratification après délibération en Conseil des ministres. Il en informe l’Assemblée Nationale et le Sénat. », alors que l’article 214 en son premier alinéa précise que « les traités de paix, les traités de commerce, les traités et accords relatifs […] au règlement des conflits internationaux […] ne peuvent être ratifiés ou approuvés qu’en vertu d’une loi ».
Abordant la question des pleins pouvoirs, l’article 7 de la Convention de Vienne dispose en son alinéa 2a que « en vertu de leurs fonctions et sans avoir à produire de pleins pouvoirs sont considérés comme représentant leur Etat, les Chefs d’Etat, les Chefs de Gouvernement et les Ministres des Affaires Etrangères pour tous les actes relatifs à la conclusion d’un traité. »
L’analyse de ces différentes dispositions pose le problème des mécanismes de conclusion des traités dans la Constitution congolaise. Celui-ci se ramène à deux préoccupations majeures : la question de l’organe habilité à engager internationalement la République c’est-à-dire investi du « TREATY MAKING POWER », d’une part, celle des rapports existant entre l’Exécutif et le Législatif dans la mise en œuvre desdits mécanismes, d’autre part.
En utilisant en son alinéa 1er l’article 213 de la Constitution les verbes « négocier » et « ratifier » le Constituant décrit, en effet, toutes les phases de la procédure de la conclusion des traités car par la négociation le Président de la République ouvre la phase de la procédure et par la ratification, il la clôt.
Ainsi le Président de la République reste le négociateur de droit détenant l’initiative d’entrer en négociation avec les tiers sans qu’il soit exclu pour lui de « négocier par personne interposée agissant en son nom. Il suffit de mandater un agent par les pleins pouvoirs signés de sa main »
Mais des limites légales sont cependant imposées à l’exercice du « TREATY MAKING POWER » dont le Président est investi.
Certes, lorsque la Constitution dispose que le Président de la République « ratifie » les traités et accords internationaux, il veut tout simplement signifier que c’est le Président de la République qui « engage l’Etat congolais vis-à-vis des Etats étrangers », il reste par conséquent l’organe habilité à ratifier les accords internationaux, mais certains accords ne peuvent, en raison de leur importance, être ratifiés qu’après la réalisation de certaines conditions précises.
Le Chef de l’Etat ne peut donner le consentement de l’Etat à être lié sur certaines matières sans l’autorisation du Parlement. Celle-ci se donne sous forme de loi. L’Accord de Washington est concerné par ces matières.
Or, le point 9 de l’Accord de Washington concernant l’entrée en vigueur dudit accord mentionne bien que « le présent Accord entre en vigueur et les obligations qui y sont annoncées prennent effet à compter de la signature du présent Accord ». Qu’est-ce à dire ? A-t-on recouru aux dispositions de l’article 7 alinéa 2a de la Convention de Vienne ? S’agit-il d’un accord « en forme simplifiée » qui serait inspiré par les executive agreements, une pratique américaine qui, elle, trouve « un appui explicite dans la Constitution américaine au moins dans la mesure où celle-ci vise, à côté des treaties, d’autres types d’accords internationaux (agreements, compacts) » ? La ratification est en principe, certes, un acte discrétionnaire, mais à quel moment joue ce pouvoir discrétionnaire ? Autant de questions concernant l’application dudit traité en droit interne. Wait and see ! (V. Joe VERHOEVEN, Droit international public, Editions Larcier, Bruxxelles, 2000 ; LUNDA BULULU, La conclusion des traités en droit constitutionnel zaïrois. Etude de droit international et de droit interne. Editions Bruylant, Editions de l’Université Libre de Bruxelles, 1984).
L’Accord de Washington a introduit dans ses clauses, un volet économique : la question d’intégration économique régionale qui a soulevé beaucoup de controverses. Nous n’aborderons pas ici cet aspect, notre intervention ayant pour objectif primordial : situer la place de l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba au milieu de cette avalanche d’initiatives en faveur de la paix au Congo.
II. DE LA PLACE DE L’ACCORD-CADRE D’ADDIS-ABEBA
En dissertant sur le Pacte Social et DOHA, il a été démontré, d’une part, que la première initiative n’avait pas de fondement juridique et que les Eglises Catholique et Protestante qui en sont les initiatrices n’étaient pas par conséquent compétentes pour organiser un dialogue qui procéderait à des réformes structurelles profondes opposables à tous, d’autre part, que le document qui sortirait de DOHA ne sera pas revêtu du caractère de traité international, qu’il serait à ranger dans la catégorie des textes « à portée juridique incertaine » mais avec une valeur hautement morale et politique.
Il apparaît dès lors, que des séries d’initiatives engagées, seuls l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba et celui de Washington restent en concurrence. L’Accord de Washington déroge-t-il à celui d’Addis-Abeba ? La question est d’autant plus importante que Washington ne retient pas dans ses dispositions le principe de responsabilité affirmé par tous les textes antérieurs pris dans le cadre de la crise congolaise. C’est d’ailleurs sur ce point précis, en dehors des critiques formulées contre le volet économique, que l’Accord de Washington a essuyé le plus de frondes.
2.1. DE LA PREEMINENCE DE L’ACCORD-CADRE D’ADDIS-ABEBA
L’Accord-Cadre d’Addis-Abeba a connu et connaît beaucoup d’obstacles dressés sur sa voie d’application. Le pouvoir a-t-il entendu échapper à l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba en allant chercher l’Accord de Washington ?
Si tel était le cas, il lui serait facilement opposé les dispositions de l’article 12 de la Convention de Vienne : « Un Etat doit s’abstenir de priver un traité de son objet et de son but […] lorsqu’il a exprimé son consentement à être lié par le traité et à condition que celle-ci ne soit pas indûment retardée ».
L’Accord-Cadre d’Addis-Abeba est qualifié de traité multilatéral tandis que celui de Washington de bilatéral et portent tous, en principe sur le même objet : l’Accord-Cadre pour la paix, la sécurité et la coopération, pour la République Démocratique du Congo et la région d’un côté, l’Accord de paix entre le Congo et le Rwanda, de l’autre. La R.D.C. et le Rwanda sont tous parties aux deux accords. Quels rapports peuvent-ils exister entre les deux textes ? La position des Tenants de la thèse du vide juridique est que l’Accord de Washington ne déroge pas à l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba.
2.2. DE LA PREUVE DE LA PREEMINENCE PAR LES TEXTES.
A première vue, on serait tenté de recourir en cette matière à la règle « Posterior derogat priori » qui signifierait que « lorsque toutes les parties au second traité le sont également au premier, celui-ci ne continue à s’appliquer que dans la mesure où ses dispositions demeurent compatibles avec celles du nouvel accord ». Cette règle est souvent dans son application combinée avec une autre : « specialia generalibus derogant » (les règles spéciales dérogent aux dispositions générales) (V. PM DUPUY, Y. KERBRAT, Droit international public, 14ème édition, Dalloz, Paris, 2018, p.351).
La résolution 2098 prise en application de l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba pose en son point 8 in fine le principe de responsabilité des personnes responsables d’atteintes aux droits de l’homme et de violation du droit humanitaire [qui doivent] répondre de leurs actes et [qui] ne devraient pas pouvoir prétendre à une intégration dans les F.A.R.D.C. ou d’autres forces de sécurité de l’Etat ». L’Accord de Washington est resté silencieux à ce sujet.
L’Accord de Washington comporte dans ses clauses une particularité dans la mesure où « les parties conviennent de lancer, dans les trois mois suivant l’entrée en vigueur du présent Accord, le cadre d’intégration économique régionale en plusieurs étapes qui sera défini dans un accord distinct intitulé « Cadre d’intégration régionale » et s’appuie sur les efforts existants, tels que la ZLE-CAF, la CIRGL, le CO et la CAE ».
Au regard de ces éléments la tentation est grande de vouloir recourir aux règles ci-haut énoncées et affirmer d’une manière précoce que Washington déroge à Addis-Abeba.
Et pourtant, il n’en est rien. Le premier réflexe pour contrer la thèse ci-haut exposée serait, comme le fait Roger B. BOPE d’exploiter le silence de la loi et d’en conclure que « Ce silence, loin d’être anodin, préserve la possibilité de poursuites pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis sur le territoire congolais » (V. GEOPOLIS HEBDO, Trihebdomadaire d’Informations générales n° 1754 du mercredi 09 juillet au jeudic10 juillet 2025, Kinshasa, p.7).
Mais l’analyse combinée des dispositions des articles 30 alinéas 1 et 3, 53, 59 alinéa 1b, du préambule et du corps de l’Accord de Washington ainsi que celles des dispositions des articles 24, 25 et 103 de la Charte des Nations-Unies nous permettent de mieux asseoir la thèse de la prééminence de l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba par rapport aux autres textes et plus particulièrement à l’Accord de Washington.
D’abord il convient dès le départ de répondre à la question de savoir s’il y a incompatibilité entre les dispositions de ces deux Accords telle qu’envisagée aux articles 30 alinéas 1 et 3 et 59 alinéa 1b de la Convention de Vienne sur le droit des traités ? nous répondons par la négative car, en effet, l’Accord de Washington reconnaît dans son préambule « la nécessité d’une résolution politique négociée – plutôt qu’une solution militaire – aux différends des Parties ; « les termes […] de la Charte des Nations-Unies et la résolution 2773 du Conseil de sécurité des Nations-Unies (21 février 2025) et les autres résolutions pertinentes du Conseil de sécurité des Nations-Unies ». Dans le corps du texte, abordant la question relative au règlement pacifique des différends, « les parties conviennent que les différends sont réglés par des processus établis par le présent Accord et d’autres accords pertinents, plutôt que par des hostilités ». Tous les résultats auxquels a abouti le processus de Luanda qui tire son fondement de l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba constitue l’annexe de l’Accord de Washington. Conformément aux dispositions de l’article 31 point 2 alinéa 1er de la Convention de Vienne sur le droit des traités relatif à l’interprétation des traités, le préambule et les annexes font partie du traité. C’est dire que sur ce point précis l’Accord de Washington reste une copie plus ou moins fidèle de l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba poursuivant le même objectif : la paix par le dialogue.
Ensuite, le principe de responsabilité dont on regrette l’omission dans l’Accord de Washington vise les droits de l’homme, le droit humanitaire. Ceux-ci font partie du « socle du jus cogens » qui au-delà de la controverse née à la suite de sa consécration par la Convention de Vienne sur le droit des traités (article 53) reste une norme impérative du droit international général qui en tant que telle se définit comme « une norme acceptée et reconnue par la Communauté internationale des Etats dans son ensemble ».
Suzanne BASTID, tout en reconnaissant que « la mise en œuvre de ces dispositions, s’agissant du droit des traités, n’a pas donné lieu à une pratique incontestable, affirme cependant dans sa conclusion que « l’idée même d’une hiérarchie dans la portée des règles juridiques liant les Etats, tend à s’affirmer en vue de diverses applications » (Suzanne BASTID, Les traités dans la vie internationale. Conclusion et effets, Editions ECONOMICA, Paris, 1985, p. 104).
Dès lors, affirmer que l’Accord de Washington n’a pas retenu le principe de responsabilité tel que confirmé par l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba et toutes les résolutions subséquentes, c’est d’abord mal interpréter le texte, ensuite c’est condamner cet Accord à la sanction prévue à l’article 53 de la Convention de Vienne qui dispose que « Est nul tout traité qui, au moment de sa conclusion, est en conflit avec une norme impérative du droit international général. Aux fins de la présente Convention, une norme impérative du droit international général est une norme acceptée et reconnue par la Communauté internationale des Etats dans son ensemble en tant que norme à laquelle aucune dérogation n’est permise et qui ne peut être modifiée que par une nouvelle norme du droit international général ayant le même caractère ».
Enfin, l’appartenance des parties à une organisation internationale a des incidences sur les conditions d’application des traités auxquels les Etats sont parties. La crise congolaise revêtue de ses aspects multidimensionnels constitue une menace contre la paix et la sécurité internationales. Sa résolution relève des dispositions du Chapitre VII de la Charte des Nations-Unies.
Ainsi, tel qu’énoncé à l’article 1er de la Charte des Nations-Unies déclarant les buts et les principes de l’ONU, le maintien de la paix et de la sécurité internationales reste un des buts primordiaux, si pas le but primordial assigné à l’organisation internationale mondiale, par le Conseil de sécurité interposé.
« Afin d’assurer l’action rapide et efficace de l’organisation, ses membres confèrent au Conseil de sécurité la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales et reconnaissent qu’en s’acquittant des devoirs que lui impose cette responsabilité le Conseil de sécurité agit en leur nom » (article 24 alinéa 1er de la Charte). En vertu de cet engagement collectif liant toutes « les nations, grandes et petites » (alinéa 3 du Préambule de la Charte) l’article 25 dispose que « les membres de l’organisation conviennent d’accepter et d’appliquer les décisions du Conseil de sécurité conformément à la présente Charte. »
De ce qui précède, P.M. DUPUY a conclu que compte tenu de l’importance de la mission confiée à l’organisation mondiale, particulièrement en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales, la Charte proclame « la prévalence de l’acte constitutif de l’O.N.U. et des actes pris en application sur les autres traités. » (P.M. DUPUY, Droit international public, 9ème édition, Dalloz, Paris, 2008, p.316). Aussi l’article 103 de la Charte des Nations-Unies dispose-t-il clairement qu’« en cas de conflit entre les obligations des membres des Nations-Unies en vertu de la présente Charte et leurs obligations en vertu de tout autre accord international, les premières prévaudront ». C’est dire que la R.D.C. et le Rwanda, tous membres de l’O.N.U. ne sont pas autorisés à s’engager dans un traité dont les clauses entreraient en conflit avec les dispositions de l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba ainsi qu’avec les résolutions subséquentes du Conseil de sécurité, même lorsque ledit traité est conclu sous l’égide des Etats-Unis.
Dans l’état actuel de la législation, en ce qui concerne la crise congolaise, un acte aussi bien à caractère national qu’international qui serait contraire aux dispositions de l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba serait nul et de nul effet.
Une fois la prééminence de l’Accord-Cadre affirmée et démontrée, textes à l’appui, il reste dans un premier temps à aborder la question relative à sa nature ainsi qu’aux conséquences qu’il faudra en tirer. Dans un second temps, nous nous efforcerons de répondre à l’importante question de savoir si toutes les préoccupations exprimées aussi bien par les forces politiques que sociales peuvent trouver une réponse dans cet Accord. C’est l’objet du point III de notre intervention qui en constitue en même temps la conclusion.
III. DE LA CONCLUSION
3.1. DE LA NATURE DE L’ACCORD-CADRE D’ADDIS-ABEBA.
L’Accord-Cadre d’Addis-Abeba est un traité international multilatéral dont la signature est intervenue en date du 24 février 2013.
A sa 6943ème séance tenue le 28 mars 2013 le Conseil de sécurité adopte la résolution 2098 [portant mesures d’application de l’Accord-Cadre et « se fondant sur l’Accord-Cadre [il] invite l’Envoyée spéciale à conduire un processus politique global ouvert à toutes les parties prenantes en vue de remédier aux causes profondes du conflit » et « demande [en même temps] au Représentant spécial pour la République Démocratique du Congo [de] promouvoir un dialogue politique transparent et sans exclusive entre toutes les parties prenantes congolaises en vue de favoriser la réconciliation et la démocratisation … » (Points 4 in fine et 146 de la résolution 2098).
Dans le cadre du rapport droit international-droit interne, la R.D.C. a opté pour le monisme avec primauté du droit international, option consacrée par l’article 215 de la Constitution.
La Constitution n’ayant pas prévu dans ses dispositions le dialogue comme moyen de résolution des conflits en R.D.C., les termes dialogue inclusif, parties prenantes, etc. repris dans les différents accords et initiatives pour la paix trouvent leurs origine et fondement légal dans l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba et doivent, par conséquent, pour en saisir correctement la portée être interprétés conformément aux principes posés à l’article 31 de la Convention de Vienne sur le droit des traités qui met en exergue, dans l’accomplissement de cette tâche, ô combien délicate, la prise en compte du contexte dans lequel les termes ont été utilisés ainsi que l’objet et le but poursuivi par le traité.
3.2. DES CONSEQUENCES A TIRER DE LA NATURE DE L’ACCORD-CADRE D’ADDIS-ABEBA.
Selon les termes de l’article 215 de la Constitution l’Accord-Cadre, en tant que traité international, a une autorité supérieure à celle de nos lois. Dès lors, tout projet, toute initiative aussi louable soit-elle qui ne s’inscrirait pas dans le cadre aussi bien constitutionnel que dans celui de l’Accord-Cadre est une infraction aux règles. Elle sera par conséquent réputée nulle et de nul effet.
En revanche, en sa qualité de traité international, l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba peut créer de nouvelles normes et bouleverser l’ordre juridique existant. C’est donc en fonction de cette théorie qu’il peut rendre possible les réformes structurelles en vue d’une gouvernance transparente tant réclamées aussi bien par le Pacte Social que par les forces politiques et sociales.
Ces dernières espèrent atteindre cet objectif en adhérant massivement au projet d’organisation par nos pères spirituels d’un dialogue inclusif. Erreur ! Les Eglises Catholique et Protestante, malgré leur grande capacité de mobilisation, n’ont pas les armes juridiques de leur politique pour arriver à des réformes structurelles profondes.
Certes, le projet aurait déjà été appuyé par le Parlement européen, le Congrès américain, et par tous les grands de ce monde mais rappelons la malheureuse expérience de l’Accord de la Saint Sylvestre appuyé par la résolution 2348 du Conseil de sécurité qui avait trouvé en cet accord la seule source de légitimité en R.D.C. Et après ? Monseigneur UTEMBI a dû jeter l’éponge malgré les appuis reçus de toutes parts.
3.3. DE LA DEFINITION DES NOTIONS D’INCLUSIVITE ET DE PARTIE PRENANTE.
Le dialogue trouvant son origine légale dans l’Accord-Cadre, il est indiqué que tous les termes y relatifs soient, pour leur meilleur compréhension, interprétés conformément aux exigences de l’article 31 de la Convention de Vienne. Ladite disposition nous exige de tenir compte, à cet effet, du contexte d’élaboration du traité, de son objet et du but poursuivi.
L’organisation chaotique des élections du 28 novembre 2011 a été émaillée de fraudes massives suivies de nombreuses protestations : trois camps ont été identifiés à cette occasion.
D’abord la majorité présidentielle prétendant avoir gagné lesdites élections et KABILA prête serment devant la Cour Suprême ; ensuite l’opposition politique massée derrière Etienne TSHISEKEDI qui, nourrissant les mêmes prétentions, prête serment à sa résidence et se lance dans la conquête de l’imperium ; enfin les Tenants de la thèse du vide juridique regroupés au sein de l’ « UR et Alliés » conduits par Norbert LUYEYE, aujourd’hui détenu à la prison militaire de NDOLO depuis 8 mois, estimant que ces élections ayant été organisées en violation de l’article 73 de la Constitution étaient nulles et de nul effet. Il n’y avait par conséquent ni vainqueur ni vaincu, tout était à refaire.
Prenant en considération ces trois positions, la Communauté internationale conduite par BAN-KI-MOON lui-même initiera des négociations secrètes où la majorité présidentielle, l’opposition et les Tenants de la thèse du vide juridique étaient bel et bien représentés. Les Tenants de la thèse du vide juridique ont toujours été représentés par M. Norbert LUYEYE.
A l’issue de ces négociations il a été conclu que le mal congolais à l’origine des crises qui secouent régulièrement notre pays, c’est la classe politique qu’il faudrait renouveler si nous voulons trouver des solutions durables aux problèmes du Congo.
Ajoutant à cet élément capital le volet sécuritaire avec la guerre de l’Est dans laquelle la même classe politique était directement ou indirectement impliquée, le Secrétaire général des Nations-Unies a réuni tous ces éléments et les a coulés dans un texte, soumis au débat à l’Union Africaine et accepté comme tel par tous les membres concernés.
Ce document dont la signature est intervenue le 24 février 2013 devant témoins n’est autre que l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba. Tel est le contexte de naissance dudit Accord.
C’est dire qu’à ce stade, selon le contexte les notions aussi bien d’inclusivité que de partie prenante renvoient aux défenseurs de trois thèses ci-haut définies.
La situation évoluant et la crise s’éternisant sous plusieurs formes, la même Communauté internationale poursuivant sa démarche en vue de l’application de cet instrument juridique international a élargi le cercle des parties prenantes et plus de cinq ans durant ces parties prenantes ont pris part aux assises d’Addis-Abeba sous son égide.
Voici ce nouveau cercle des parties prenantes : USN, FCC, LAMUKA, « UR et Alliés et le M23. Toutes ces parties ont été représentées à ces assises à un haut niveau.
Un travail de titan a été réalisé conformément à ce cadre légal et se retrouve aujourd’hui sur la table du Conseil de sécurité, de l’Union Africaine, de la SADC, de l’EAC, du Secrétaire général des Nations-Unies.
Les Tenants de la thèse du vide juridique, partie prenante aux assises d’Addis-Abeba, ont pris la responsabilité d’en dévoiler le contenu dans leur déclaration datant du 14 novembre 2023 publiée au journal La Prospérité n° 6212, pp. 13 et 15 et ayant pour intitulé : Notre solution à la crise congolaise : réaction des Tenants de la thèse du vide juridique au Mémorandum de la société civile.
Quid de la société civile ? Selon l’esprit et la lettre de l’Accord-Cadre, il n’existe pas de société civile autonome, neutre et indépendante en R.D.C. Chaque branche de la société civile est alignée sur un parti ou regroupement politique bien déterminé. Il appartiendra par conséquent à chaque partie prenante identifiée ci-haut d’incorporer dans son quota la branche de la société civile de sa tendance.
Ainsi clarifiées l’inclusivité ou la notion de partie prenante devront se comprendre conformément aux principes arrêtés par le texte qui organise le dialogue. Jamais l’inclusivité ne se réalisera par ces visites de porte à porte auxquelles nous assistons et qui sont organisées en fonction des soubresauts et tintamarres se produisant chaque jour sur la scène politique et justifiés par l’odeur du dialogue.
3.4. DE LA REPONSE DE L’ACCORD-CADRE AUX ATTENTES DES FORCES POLITIQUES ET SOCIALES.
Comme démontré ci-haut, l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba a créé un cadre légal où doit s’organiser un dialogue politique tant réclamé.
En décrétant en son point 5, paragraphe 1er, alinéa 6 la réforme structurelle des institutions de l’Etat, y compris la réforme des Finances, l’Accord-Cadre permet les réformes structurelles profondes tant chantées aussi bien par les Eglises Catholique et Protestante que par les forces politiques et sociales.
Mais celles-ci se réaliseront dans un cadre légal et dont l’autorité est supérieure à celle de nos lois et auront l’avantage d’avoir un caractère contraignant et les décisions qui sortiront dudit dialogue seront opposables à tous. A tous de se mobiliser pour leur application.
Le principe de responsabilité ? L’interprétation combinée des différents textes pris en la matière a démontré que l’Accord de Washington ne peut entrer en contradiction avec l’Accord-Cadre d’Addis-Abeba.
Le plan de sortie de crise de KABILA décliné en 12 points ? A l’analyser de très près, il s’agit de la prise en compte des points inscrits à l’ordre du jour du dialogue tels qu’énoncés au point 5 paragraphe 1er de l’Accord-Cadre mais saucissonnés en 12 points.
LA SOLUTION DE LA CRISE EST DANS L’ACCORD-CADRE D’ADDIS-ABEBA.
MOBILISONS-NOUS POUR SON APPLICATION !
POUR LES TENANTS DE LA THESE DU VIDE JURIDIQUE
REGROUPES AU SEIN DE L’UR ET ALLIES
Odéric NYEMBO-ya-LUMBU MUTUMBIWA
Président de l’Alliance Nationale pour la République, « A.N.R. »
L’accord de paix signé le 27 juin 2025 entre la RD Congo et le Rwanda (Accord de Washington) continue de provoquer des réactions de toutes parts. Jamais, de mémoire de congolais, un accord n’a autant suscité de commentaires dans toutes les couches de la société congolaise. Juristes, professeurs, acteurs politiques, hommes d’églises, membres de la société civile, journalistes, chroniqueurs de média, chacun y est allé de son interprétation. Tant il est vrai que l’enjeu autour duquel se fédèrent tous les congolais demeure la paix, longtemps espérée, dans la région meurtrie de l’Est du pays.
En passant en revue les appréciations critiques envers cet Accord de Washington, on s’aperçoit qu’il est essentiellement, et sans cesse, reproché au Gouvernement congolais d’avoir accepté d’intégrer dans cet Accord le Plan harmonisé de neutralisation des FDLR et désengagement des Forces/levée des mesures défensives du Rwanda, issu des Accords de Luanda du 31 octobre 2024, alors que la Résolution 2773 du Conseil de sécurité des Nations-Unies du 21 février 2025 exige le retrait immédiat et sans conditions de l’armée rwandaise du Congo.
Selon les auteurs de cette critique, en intégrant le Plan harmonisé de neutralisation des FDLR et désengagement des Forces/levée des mesures défensives du Rwanda, l’Accord de Washington a anéanti la Résolution 2773 car il conditionne désormais le retrait des Forces de Défense Rwandaise du territoire national congolais à la neutralisation, préalable ou concomitante, des FDLR par la RDC.
Cette interprétation a connu un retentissement incontestable auprès de la population, qui s’est mise à douter sur les réelles perspectives de paix au sujet de cet Accord. Nous pensons cependant que les tenants de cette critique n’ont pas, de bonne foi sans doute, perçu un élément, pourtant bien visible, qui renverse leur analyse.
Nous allons tenter de le démontrer dans les lignes qui suivent. Car l’Accord de Washington, loin d’affaiblir la résolution 2773, lui confère, au contraire, une application pratique effective indéniable. Pour bien expliciter notre propos, nous allons donc examiner, tour à tour, la résolution 2773 et l’Accord de Washington.
L’apparente contradiction de la Résolution 2773
La Résolution 2773 est un texte succinct qui ne comporte que 18 points, outre le préambule. Elle tient seulement sur quatre pages et sa lecture est relativement aisée.
Comme déjà expliqué, les auteurs qui critiquent l’Accord de Washington estiment que la Résolution 2773 est ruinée parce que cet Accord comporte le Plan harmonisé de neutralisation des FDLR et désengagement des Forces/levée des mesures défensives du Rwanda, pendant que la Résolution 2773, elle, demande le retrait immédiat et sans conditions des forces rwandaises du Congo.
Effectivement, le point 4 de la Résolution 2773 stipule que le Conseil de Sécurité « demande à la Force de défense rwandaise de cesser de soutenir le M23 et de se retirer immédiatement du territoire de la République démocratique du Congo, sans conditions préalables. »
Cependant, nous avons l’impression que les uns et les autres ne se sont visiblement arrêtés qu’à ce seul article, sans pousser plus loin la lecture de la Résolution 2773. Autrement, ils se seraient aperçus que cette même Résolution 2773 intègre, elle aussi, le Plan harmonisé de Luanda, et dans une formulation encore plus directe et plus pressante que l’Accord de Washington.
En effet, dans le point 5 de la Résolution 2773, le Conseil de Sécurité « invite instamment les deux parties à honorer pleinement et rapidement les engagements qu’elles ont pris dans le cadre du processus de Luanda en ce qui concerne l’exécution du plan harmonisé pour la neutralisation des Forces démocratiques de libération du Rwanda et le désengagement des forces du territoire de la République Démocratique du Congo… »
A ce stade, sans qu’on soit juriste ou grand clerc, il apparaît clair que l’analyse selon laquelle l’Accord de Washington aurait marchandé la Résolution 2773 ne tient pas la route.
Maintenant, revenons à l’origine de la critique et entrons dans une analyse simplement juridique de la Résolution 2773.
Si, comme l’affirment les critiques, le Plan harmonisé rabaisse et dépouille l’exigence de retrait immédiat et sans conditions des Forces de défense rwandaise de sa force contraignante, cela signifie donc que le point 4 et le point 5 de la même Résolution 2773 sont en contradiction.
Donc, le Conseil de sécurité des Nations-Unies se serait contredit dans son propre texte ?
Donc, la cohorte de juristes internationaux expérimentés dont regorge l’ONU se seraient trompés en rédigeant cette Résolution 2773 ?
Non, c’est invraisemblable !
Une lecture attentive permet de comprendre qu’Il n’y a pas d’opposition entre le point 4 et le point 5 de la Résolution 2773. Il n’y a pas de contradiction entre le retrait immédiat et le Plan harmonisé.
Et voici l’élément qui a échappé à l’attention des auteurs qui ont critiqué l’Accord : le point 4 et le point 5 de la Résolution 2773, le retrait immédiat et le Plan harmonisé, NE VISENT PAS LES MÊMES SITUATIONS ET S’APPLIQUENT DONC A DES RÉALITÉS MILITAIRES DIFFÉRENTES !
En effet, le point 4, qui demande le retrait immédiat, ne s’applique qu’à « la Force de défense rwandaise », c’est-à-dire l’armée régulière du Rwanda qui stationne au Congo en violation flagrante et grave du principe cardinal de souveraineté et d’intégrité territorial des États.
Tandis que le point 5 aménage un Plan harmonisé de neutralisation des FDLR et désengagement des Forces/levée des mesures défensives du Rwanda. Un plan qui vise, parallèlement à la neutralisation des FDLR, toutes les mesures militaires prises et exercées par le Rwanda, autres que l’occupation d’une partie du territoire congolais par l’armée régulière du Rwanda : déploiement et engagement des forces le longs des frontières, soutien d’incursions militaires de toutes sortes en territoire congolais sous couvert de groupes armés, mobilisation de troupes et mise en situation de combat et toutes autres activités militaires hostiles mises en place par le Rwanda.
Le Plan harmonisé ne vise donc pas les troupes régulières de l’armée rwandaise stationnées au Congo. En voici les principales raisons :
1- Le Rwanda a toujours réfuté la présence de ses troupes régulières au Congo. S’il a approuvé et signé ce Plan harmonisé, c’est parce que celui-ci n’évoque aucunement la présence de troupes rwandaises au Congo. Autrement, il n’aurait pas signé ce Plan harmonisé.
2- L’ONU ne peut pas se mettre à administrer une violation grave du droit international que représente l’occupation militaire d’un territoire étranger, par la voie de plans harmonisés ou d’aménagements qui s’étalent dans le temps. Avec le risque que ces plans et aménagements ne fonctionnent pas. Ce qui reviendrait, en pratique, à entériner l’occupation militaire.
3- La RD Congo n’accepte pas de subir l’humiliation de l’occupation rwandaise et, rester dans cette situation jusqu’à ce que les plans harmonisés et les aménagements aient produit leurs résultats.
Voilà donc pourquoi les troupes de l’armée régulière rwandaise stationnées au Congo ont fait l’objet, non pas d’un pan harmonisé et conditionnel de retrait, mais d’une demande de retrait immédiat et sans conditions, édictée par le point 4 de la Résolution 2773.
Et encore faut-il que cette Résolution trouve application.
L’accord de Washington et l’application de la Résolution 2773
Il est incontestable que la Résolution 2773 du Conseil de sécurité a été initiée par les USA.
Au tout début de son point 5, la Résolution 2773, pour son application, demande au Congo et au Rwanda de « reprendre d’urgence et sans conditions préalables les pourparlers diplomatiques afin de parvenir à un règlement durable et pacifique du conflit qui perdure dans la région. ».
Toujours dans le même point 5, la Résolution ajoute qu’elle soutient « toutes les initiatives et contributions visant à atteindre cet objectif ». C’est-à-dire le règlement durable et pacifique du conflit. C’est donc sur cette disposition que prend appui l’initiative américaine.
Les USA voulaient agir très rapidement, pour des raisons qui ne sont pas aujourd’hui notre propos.
Cependant, même dans cette rapidité, les USA ne se sont pas précipités. Ils ont pris le temps, avec la batterie de juristes et conseillers de la Maison-Blanche, de bien analyser la situation dans l’Est du Congo : l’historique du conflit, les causes du conflit, les protagonistes, les parties prenantes, les revendications des uns et des autres, les différentes tentatives de règlement, les comportements et les attitudes des protagonistes lors des négociations précédentes, les causes d’échec de ces tentatives de règlement.
Après donc avoir cerné la problématique à travers tous ces facteurs, les USA ont décidé de mettre en place un instrument pragmatique qui assurerait de façon efficace le règlement durable et pacifique du conflit.
Les USA ont donc déployé leur intervention en deux temps.
- Première étape : Déclaration de principes
Avec la capacité de pression et de persuasion qui les caractérise, les USA ont incité le Congo et le Rwanda à signer, le 25 avril 2025, une Déclaration de Principes, avec effet contraignant.
D’entrée de jeu, cette Déclaration de Principes exige le respect et l’observation du principe cardinal qui a été violé par l’Armée régulière rwandaise suite au stationnement de troupes dans le territoire congolais. En effet, le tout premier point de l’Accord de principes (et, ce n’est pas anodin) stipule :
« Chaque Participant reconnaît la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’autre et s’engage sur une voie permettant de régler leurs différends grâce à des moyens pacifiques, ancrés dans la diplomatie et la négociation plutôt que par un recours à la force ou à des discours hostiles.
Chaque Participant reconnaît les frontières territoriales établies de l’autre et s’engage à s’abstenir de toute action ou de tout discours qui menace ou remet en question la validité de ces frontières.
Chaque Participant reconnaît à l’autre le droit souverain de gouverner et d’administrer son propre territoire d’une façon qui n’enfreint pas la souveraineté ou l’intégrité territoriale de l’autre Participant.
Les Participants s’engagent à s’abstenir de toute ingérence dans les affaires internes de l’autre. »
Peu de gens se posent la question de savoir pourquoi les USA ont « contraint » le Congo et le Rwanda à signer cette Déclaration de principes, avec, à la clé, l’obligation expresse de revenir à Washington, au plus tard le 25 mai (sic !) pour présenter un projet d’accord de paix. On pouvait bien signer un accord de paix sans forcément passer par une déclaration de principe !
A la vérité, en relisant cette Déclaration de principes, on s’aperçoit que les USA, bien informés du comportement des protagonistes lors des négociations antérieures, voulaient en fait, d’une part, « forcer » le Congo et le Rwanda, à ne plus louvoyer, c’est-à-dire à ne plus chercher de faux-fuyants et à ne plus inventer de prétextes destinés à empêcher la conclusion d’accords, et, d’autre part, « obliger » le Congo et le Rwanda à revenir à Washington pour signer un accord de paix conformément à cette Déclaration de Principes !
Et c’est ce qui a été fait.
- Deuxième étape : L’Accord de Paix
Comme ils y étaient incités, le Congo et le Rwanda sont donc revenus à Washington et ils ont signé l’Accor de paix du 27 Juin 2025.
Et les toutes premières dispositions au respect desquelles renvoie expressément le préambule de l’Accord de paix (et ce n’est toujours pas anodin), c’est la Déclaration de principes signée le 25 Avril 2025 :
« … RÉAFFIRMANT l’engagement mutuel de respecter la Déclaration de principes signée par les Parties le 25 avril 2025, fondé sur le respect mutuel de la souveraineté, de l’intégrité territoriale, de l’unité nationale et du règlement pacifique des différends ; »
Et lorsqu’on connaît l’importance du préambule dans un traité ou un accord international, on saisit tout de suite l’implication de ce renvoi vers la Déclaration de principes.
Après l’Accord de paix, beaucoup de gens ont oublié cette Déclaration de principes. Mais pas les juristes de la Maison-Blanche qui considèrent cette Déclaration de principes comme la pièce maîtresse de tout l’édifice juridique mis en place par les USA.
Et les points I et II de l’Accord de paix ne sont que le traduction pratique de la Déclaration de principes.
Pour souligner la supériorité de l’Accord de paix vis-à-vis du Plan harmonisé, l’Annexe stipule clairement dans son point 1b : « En cas de conflit entre le présent Accord et le CONOPS (le Plan harmonisé), le présent Accord et ses annexes font foi. »
Pour s’assurer de l’effectivité de cet Accord de paix, les USA ont décidé de surveiller eux-mêmes sa bonne application, avec la mise en place d’un Comité de surveillance conjointe, en y associant seulement le Qatar et le Facilitateur de l’Union africaine (pas l’Union africaine). Les Nations-Unies et l’Union européenne en sont malheureusement écartées. Probablement pour éviter des lourdeurs d’action.
Et le champ d’action de ce Comité de surveillance conjointe est largement inclusif car il est expressément prévu dans son mandat, notamment, « de prendre des mesures, le cas échéant, pour remédier aux violations ». La nature de ces mesures n’ayant pas été précisée, juridiquement cela signifie que toutes les options sont envisageables.
Certains observateurs ont exprimé un certain pessimisme envers la disposition de l’Accord de paix selon laquelle « Le présent accord ne crée aucune obligation pour les Etats non-Parties siégeant au Comité de surveillance conjointe », estimant que, par cette disposition, les USA, État non-Partie mais parrain de l’Accord, ne garantissait pas l’application de l’Accord de paix. Nous voudrions juste rappeler qu’il s’agit d’une clause-type que l’on trouve dans la plupart des Accords internationaux et qui n’est que l’expression du principe de relativité des contrats : « Le contrat ne crée d'obligations qu'entre les parties » (Droit privé). En droit international, cette clause est destinée à préserver la marge de manœuvre politique des Etats-tiers dans l’appréciation de l’opportunité d’intervention dans une situation de crise où ils sont parties prenantes.
Je voudrais, pour terminer, partager l’ahurissement qui m’a frappé à l’occasion de la signature de cet Accord de paix. En effet, c’est avec effarement que j’ai vu tout le monde se transformer en commentateur et en interprète d’accords internationaux. Des commentateurs de médias et des personnalités publiques de tous bords, à longueur de journée, ont proféré des énormités, des aberrations, des non-sens d’abord au sujet de la Déclaration de principes, puis sur l’Accord de paix , en prenant des postures doctes et péremptoires, et avec une assurance papale. Contribuant ainsi à embrouiller et à obscurcir la compréhension du grand public.
Loin de moi l’intention d’écarter qui que ce soit du débat, mais, croyez-moi, interpréter un texte juridique, et à fortiori un texte international, requiert une formation juridique poussée et la possession d’outils juridiques spécifiques. Déjà, il faut lire tout le texte, en entier, de bout en bout. Ensuite ne jamais perdre de vue que les articles d’un texte ont entre eux un lien organique et forcément s’interagissent à un stade ou à un autre.
Un élément qui a échappé aux apprentis-interprétateurs : on n’interprète pas un texte international à partir de la version traduite, mais toujours à partir de la version d’origine c’est-à-dire la version en langue de rédaction. C’est ainsi que sur le site Internet du Département d’État américain, à la fin du texte de la Déclaration de principes, on trouve cet avertissement :
« Nous vous proposons cette traduction à titre gracieux. Seul le texte original en anglais fait foi. »
Car, en passant du texte d’origine à la version traduite, il peut se glisser des oublis, des contre-sens, des ambigüités, des atténuations ou des aggravations qui modifient la portée du texte.
Un exemple, pour vous en convaincre. Tenez ! prenons justement la Déclaration de principes du 25 Avril 2025.
Dans la première phrase du point 3 de la version anglaise, il est écrit : « The Participants commit to a phased regional economic integration framework building on existing efforts, such as the ICGLR, COMESA, and the EAC,... ».
Dans la version traduite en français, l’adjectif phased (séquencé ou par étapes) n’est ni repris, ni traduit. Et cela donne : « Les Participants s’engagent envers un cadre d’intégration économique régionale faisant fond sur les efforts existants, notamment l’ICGLR, la COMESA et l’EAC… ».
Alors que la version d’origine parle d’une intégration économique régional par étapes, cette précision n’apparaît pas dans la version traduite en français. Ce qui ne change pas mal de choses dans la pratique !
Mesdames et Messieurs, il s’agit ici d’un Accord de paix après 30 ans de guerre ! Soyons sérieux et ayons un peu de retenue dans nos commentaires et dans nos interprétations.
Déjà, entre nous les juristes, on n’est pas toujours totalement en accord sur l’interprétation d’un texte, alors n’en rajoutez pas !
La personne intelligente est celle qui a l’intelligence de connaître ses limites.
Et, tous, nous avons des limites
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La RDC a signé un contrat avec les équipes européennes dont l'As Monaco, AC Milan et le FC Barcelone pour que sur leurs maillots soient inscrits la marque ‘’RDC cœur de l'Afrique’’. Le fait de parapher ces contrats, le gouvernement va devoir débourser plus de 50 000 millions de dollars. Si cette démarche est saluée par certain, ce n'est pas le cas pour Promesse Matofali Yonama, Député provincial honoraire du Nord-Kivu, qui estime que ce n'est pas une priorité, surtout en ce moment de crise.
Dans une déclaration publiée hier, lundi 14 juillet 2025, Promesse Matofali Yonama affiche son indignation suite à la signature de ces contrats alors que le pays a beaucoup de priorités et des urgences.
«Chers compatriotes, nous sommes indignés d'apprendre que notre gouvernement, à travers le Ministère des Sports et Loisirs, est en train de signer des contrats en cascade avec différents clubs de l'Europe.
Nous nous indignons car c'est anormal qu'un pays en guerre, un pays où les soins de santé primaire posent encore problème, un pays où l'eau potable est presque inexistante, un pays qui n'a pas des routes, un pays qui a un problème des salaires avec ses agents, un pays qui est incapable de doter chaque ville et territoire d’une ambulance, un pays où les cadavres sont encore transportés sur les motos, des vélos et dans des sacs. Nous sommes vraiment désolés d'apprendre que pour une visibilité, le gouvernement vient d'engager plus de 70 millions.
La question que je me pose, on va faire la visibilité de quel pays ? Voilà pourquoi nous nous indignons aujourd'hui.
Nous demandons au gouvernement de faire les choses de manière prioritaire.
La population a besoin d'eau potable, des ambulances, des routes, des hôpitaux... ça veut dire qu'il y a des besoins prioritaires auxquels le gouvernement devrait se pencher.
Malheureusement, on va perdre plus de 70 millions dans des futilités, dans des choses qui ne sont pas importantes alors qu'avec cet argent, on peut construire un hôpital par province, on peut doter au moins 10 ambulances pour toutes les provinces, on peut doter des corbillards et faire les grands projets d'intérêt général.
C'est bon de faire la visibilité mais on doit le faire en étant propre, lorsqu'on a les garanties que toutes les choses vont bien.
Comment faire la visibilité de notre pays alors qu'on continue à tuer des gens dans l'Est du pays de Moïse Katumbi ?
Avant-hier on a tué à Irumu dans la province de l'Ituri plus de 65 personnes, toutes originaires du Nord-Kivu et les cadavres ont été ramenés à Oicha dans des sacs sur les motos, ce qui doit faire pleurer tout Congolais conscient.
Mais, le gouvernement s’est décidé de dilapider plus de 70 millions dans la visibilité, ce qui n'est ni urgence, ni priorité. Voilà pourquoi, nous avons choisi de rester derrière Katumbi qui est un homme aux actions concrètes et qui cherche d'abord la solution à l'interne », a dit Promesse Matofali Yonama, Député provincial honoraire et cadre d’Ensemble pour la République au Nord-Kivu.
Ce dernier invite le gouvernement de prendre les choses au sérieux en se servant des besoins réels ressentis par la population avant toute action.
Il convient de signaler que, selon certaines sources proches du Ministère des Sports, la RDC compte signer d'autres contrats au-delà de ces trois précédemment signés.
Depuis Lubumbashi, Sa Majesté le Prophète Joseph Mukungubila rompt le silence et s’exprime sur l’accord de paix signé entre la République Démocratique du Congo et le Rwanda, le 27 juin 2025 à Washington, sous l’égide des États-Unis. Présent dans le Haut-Katanga pour un pèlerinage personnel sur la tombe de son père, le leader religieux a pris la parole pour clarifier sa position, alors que les débats s’enflamment au sein des sphères politiques et religieuses du pays.
Face aux critiques sévères émises par une partie de la classe dirigeante, Joseph Mukungubila plaide pour une approche lucide et responsable. Il met en garde contre la désinformation propagée autour de cet accord, qu’il estime délibérément manipulée pour troubler l’opinion publique.
« On est en train de répandre ces informations pour intoxiquer les gens. Ce n’est pas sérieux, ça. Vous savez, ce n’est pas sérieux. C’est comme si on devenait au moins un tout petit peu sans compréhension, comme si ici on n’a pas étudié, on ne comprend pas. Je ne pense pas que ce soit ce que les autres sont en train d’avancer. Il y a des informations. On est en train d’intoxiquer les gens », a-t-il alerté.
Le 5 juillet, à son arrivée à Lubumbashi, Mukungubila a réaffirmé cette position devant la presse : « Ces accords sont mal interprétés. Certains cherchent à intoxiquer le peuple congolais avec de fausses informations. Il faut comprendre l’origine et l’esprit de cette médiation ».
Revenant sur le rôle de Donald Trump dans ce processus, le prophète balaie les soupçons d’intérêts étrangers camouflés, affirmant que l’ancien président américain aurait agi sous l’impulsion d’une révélation divine.
« Le Président Trump a agi après une révélation des jeunes israélites qui affirment que le jardin d’Eden se trouverait en RDC. Voilà ce qui a changé son agenda », a-t-il expliqué.
Appelant le peuple congolais à rester uni et vigilant, Mukungubila insiste sur le fait que l’unité nationale est essentielle pour préserver les ressources naturelles et assurer une paix durable : « Les étrangers nous ont toujours pillés. Tous les étrangers. Ils ont toujours envié ce pays. Pourquoi ? À cause de toutes les richesses que notre sol, le sous-sol, cache. Ça, ce n’est même pas un secret. C’est parce que les étrangers nous envient. Et les étrangers, sans exception aucune. Les étrangers nous ont toujours enviés à cause de nos richesses. Mais ce pays doit rester debout grâce à l’éveil de son peuple », a-t-il martelé.
En s’exprimant ainsi, Joseph Mukungubila marque une nette divergence d’approche avec des figures comme le Cardinal Fridolin Ambongo ou Mgr Donatien Nshole, qui ont exprimé des réserves sur un processus jugé éloigné des réalités du terrain. À l’opposé, le prophète voit dans cet accord une opportunité pour le Congo de faire preuve de maturité politique et spirituelle face aux défis géopolitiques qui le guettent.
Il est anormal de voir ou d’entendre ceux qui critiquaient et continuent de critiquer à longueur de journée les accords signés sous les régimes précédents empêcher aujourd’hui leurs compatriotes d’exercer leur droit à la transparence alors qu’ils le réclamaient des autres. D’ailleurs, c’est à l’avantage de Félix Tshisekedi d’encourager ce débat, pourvu que les règles de bienséance soient respectées…
Au final la potence est réservée au chef de l'Etat seul !
Qu’est-ce qui n’a pas été dit sur la Constitution actuelle et les accords politiques de ces 30 dernières années ? Pour rappel, il y a eu le Dialogue inter congolais entre 2001 et 2003 ; l’Accord de Goma en 2009, les Déclarations de Nairobi en 2013, les Concertations nationales en 2014, le Dialogue de la Cité de l’Union africaine et les Négociations du Centre interdiocésain catholique en 2016, la Consultation présidentielle en 2020 et, tout récemment, les Consultations présidentielles en 2025.
Qu’est-ce qui n’a pas été dit des Accords diplomatiques conclus avec le Rwanda et l’Ouganda en 2002 ainsi que l’Accord-cadre d’Addis-Abeba en 2014 ?
Qu’est-ce qui n’a pas été dit autour des Accords économiques, entre autres le contrat sino-congolais de 2008 revisité en 2023 et les accords commerciaux et industriels avec le Rwanda en 2021 ?
Tout a été dit et en plus dans tous les sens, et même sur fond de manipulation, d’intoxication, de désinformation impliquant parfois des scientifiques que sont des professeurs d’université. On a d’ailleurs entendu des acteurs politiques majeurs se dédire pour seulement se maintenir en poste.
Au final, la potence est réservée au chef de l’Etat seul ! En 65 ans d’Indépendance, Joseph Kasa-Vubu et Mobutu Sese Seko avant-hier, Laurent-Désiré Kabila et Joseph Kabila hier, Félix Tshisekedi aujourd’hui en savent quelque chose. Preuve qu’à la fin de son second et dernier mandat en 2028 - n'en déplaise au scientifique Paul Tshimbulu - le chef de l’Etat en fonction verra la même pratique de remise en cause en sa défaveur se répéter. Moralité : il y a lieu de laisser ouvert le débat en cours sur l’Accord de Washington, ce au nom de la transparence.
Mobiliser des têtes pensantes…
A propos justement de ce document, les officiels doivent s’en tenir à sa dénomination originelle. Dans les documents engageant l’Etat, ils n’ont pas à emprunter le langage des médias. Le texte signé à Washington le 27 juin 2025 a pour titre «ACCORD DE PAIX ENTRE LA REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO ET LA REPUBLIQUE DU RWANDA»" et non "Accord de Washington comme évoqué dans un communiqué officiel du Gouvernement.
C’est déjà bon que la Première ministre ait désigné la ministre d'État des Affaires étrangères, le ministre de la Communication et la Cellule de Communication du Cabinet du Président de la République pour communiquer "officiellement sur le processus de médiation en cours à Doha, au Qatar, ainsi qu’au récent Accord conclu aux Etats-Unis d’Amérique», encore qu’au sujet de la Cellule de Communication, l’instruction doit venir plutôt de la de la Présidence de la République et non de la Primature.
Réaction réfléchie d’un compatriote sur X.com : «La Première Ministre a simplement constaté que plusieurs cadres de l’Union sacrée, bien que de bonne foi, s’expriment sur des dossiers dont ils ne maîtrisent ni les enjeux, ni les subtilités diplomatiques. D’où la nécessité de centraliser la parole publique autour des entités officiellement mandatées».
En d’autres mots, la parole est retirée à tous les autres membres du Gouvernement et à toutes les structures qui relèvent de l’Exécutif national.
L’idéal serait cependant de laisser les forces politiques et sociales privées de l’Union sacrée de la nation, Udps en tête, la liberté de débattre de la question avec toute personnalité morale ou physique qui soit de l’Opposition et/ou de la Société civile à condition, pour le camp présidentiel, de mobiliser des têtes pensantes. Celles qui sachent réagir avec un langage scientifique qu’avec un langage plutôt politiste (et finalement polémiste) que politique. Des têtes capables de tenir un débat public dans un média, et non celles qui se réfugient dans des meetings à pensée unique et inique rappelant l'époque "Tata Boh ? Mokonzi Boh ? Ekolo Boh !"
L’opinion populaire sera prise en compte dans tous les calculs
Déjà, la parole ne peut pas être retirée à la population, alias peuple ! Non seulement parce que la liberté d’expression et le droit à l’information sont garantis par la Constitution à l’article 23 pour la première et à l’article 24 pour le second, mais surtout parce que la population a besoin de «transparence». Concept consacré par l’Udps pendant ses 37 ans d’opposition comme arme combat politique mais visiblement oublié depuis la découverte des ors et des lustres du Pouvoir.
Sa campagne menée jusqu’à ce jour par rapport aux Accords conclus par le passé en est la preuve.
L’avantage avec le débat ouvert est que tous les protagonistes congolais, étrangers et internationaux finiront par admettre que la population congolaise fait désormais sienne l’exigence de transparence. L’expression utilisée autrefois était «appropriation par le souverain primaire».
L’avantage avec le débat ouvert est que pour les partenariats extérieurs à venir, l’opinion de la population congolaise sera prise en compte dans tous les calculs diplomatiques visant la coopération structurelle (tous domaines confondus) et surtout les affaires.
Une telle communication à tout du suicide diplomatique, mais aussi politique
Il est inutile de se croire toujours capable de manipuler l’opinion. Au-delà du débat classique, l’opinion a aujourd’hui accès à Internet. Mieux à l’Informatique. Davantage mieux à l’Intelligence Artificielle.
Ce n’est pas – juste un exemple – parce qu’on peut utiliser cet outil qu’on doit se croire capable de l’emporter par le jeu de la manipulation, de l'intoxication, de la désinformation.
Exemple édifiant : le dernier Rapport des Experts des Nations Unies.
La Communication présente le Rwanda en responsable n°1 de la guerre à l’Est de la RDC sur fond du pillage des ressources minières. Ce qui est vrai sur toute la ligne.
Ce qui ne se dit pas cependant, c’est qu’avec son Budget annuel (autour de 5 milliards de dollars américains pour l'exercice 2025) le Rwanda n’a pas la capacité financière de soutenir un effort de guerre en terre congolaise depuis une trentaine d’années, bien qu'il s'agisse des guerres par intermittence.
Le Rapport parle certes de multinationales comme marché de rachat des minerais extraits du sous-sol congolais*. Il soutient qu'une fois mélangées avec les petites quantités du sous-sol rwandais, les grosses quantités extraites du sous-sol congolais perdent toute traçabilité.
Ainsi, les experts des Nations Unies prennent les Congolais pour une masse imbécile incapable de savoir que ceux qui arment le Rwanda sont justement les mêmes qui rachètent les minerais du pillage !
Ils nous prennent pour une masse stupide au point de nous faire croire que ces multinationales n’ont pas de visage d'un gouvernement !
A ce qu’on sache, une multinationale comme appel est reconnue comme une société de droit américain.
Partant, le gouvernement américain ne peut prétendre tout ignorer des activités illégales et illicites de sa multinationale en RDC ! D'où la plainte à sa charge en décembre 2024 mais vite oubliée parce qu'en plus d'être jugée " insuffisamment caractérisée » par la justice française le 18 février 2025, elle ne peut pas être relancée pour faire gagner à la RDC le retour à la paix via l'Accord de Washington !
Par voie de conséquence, la Communication qu’on nous balance via les médias au sujet du Rapport des Experts des Nations Unies est visiblement orientée de façon à attribuer tous les malheurs du Congo au Rwanda et à ses "pantins". Une communication à la fois corruptive et corruptrice.
En toute logique, Kinshasa n'a pas à se prêter à ce jeu malsain.
Si les Occidentaux et leurs multinationales veulent en découdre avec le Rwanda et ses supplétifs, c'est leur affaire ! Et s'ils ne veulent pas apparaître aux côtés du Rwanda comme étant leur "parrain" direct ou indirect, c'est aussi leur affaire.
C’est, du reste, la seule explication à donner à ce qui s’apparente à une bravade de la part Paul Kagame lorsqu’il s’en prend à ses «sponsors».
Que Kinshasa en vienne à "parrainer" à son tour une communication aussi suicidaire au plan diplomatique que politique pour le Rwanda, c'est au finish suicidaire aussi pour la RDC à tous les plans. Tant que Washington continue de materner Kigali.
Les morts, les déplacés et les exilés par millions, de même que les victimes des pillages du fait des guerres de l'Est, ce n'est ni au Rwanda, ni en Ouganda, ni au Burundi.
C'est en RDC.
PROCHAINEMENT : «Le mythe Kagame est une création de l’Opposition et de la Société civile autrefois sponsorisées par l’Occident»
Le 27 juin 2025, un accord a été signé à Washington entre la République démocratique du Congo (RDC) et le Rwanda, sous la médiation de Donald Trump. Présenté comme une percée diplomatique en vue de la paix dans l’Est du Congo, ce traité ne fait en réalité que consacrer l’humiliation d’un État qui a abandonné toute souveraineté stratégique. La RDC a signé un texte qui entérine la version rwandaise du conflit, en validant des présences ennemies non confirmées, en ignorant les intérêts de sa population et en posant les bases d’un nouveau cycle d’occupation et de justification militaire étrangère.
L'exemple oublié du Koweït
Le Congo de 2025 semble avoir oublié ce que le Koweït avait compris en 1990. Lorsque l’Irak de Saddam Hussein envahit le Koweït, ce petit État pétrolier choisit de ne pas négocier avec Bagdad. Au contraire, il se tourne directement vers Washington. Les États-Unis répondent par une intervention massive (opération Tempête du désert), écartant totalement l’Irak et installant une présence militaire durable sur le sol koweïtien.
Le Koweït a négocié directement avec la superpuissance. Il a isolé l'agresseur et transformé l'agression en opportunité diplomatique et sécuritaire. Il en est sorti renforcé.
La RDC, elle, a fait tout le contraire.
Au lieu de se tourner vers les États-Unis comme partenaire principal, Kinshasa a accepté la présence de Kigali à la même table. Elle a donné au Rwanda le statut de partenaire de paix, alors que celui-ci est désigné depuis plus de deux décennies comme l’agresseur principal de l’Est congolais.
C’est comme si le Koweït, au lieu de résister, avait convié l’Irak à signer un accord à trois avec les États-Unis, et avait lui-même validé les justifications de l’occupant. C’est exactement ce que vient de faire la RDC. Et cela restera dans l’histoire comme un exemple de capitulation diplomatique volontaire.
Une reconnaissance implicite qui ouvre la voie au pire
Ce qui choque le plus dans cet accord, c’est la reconnaissance implicite des FDLR (Forces démocratiques de libération du Rwanda). En acceptant que ces groupes constituent une menace pour le Rwanda, la RDC reconnaît leur présence, sans fournir de preuve, ni en localiser les positions, ni même en donner une cartographie. Où sont ces FDLR ? Combien sont-ils ? Où est leur base ? Qui les dirige ? Sur quel territoire agissent-ils ? Aucune réponse.
Pourtant, le gouvernement a signé. Il a validé une narrative qui n’est pas la sienne, mais celle du Rwanda, qui depuis longtemps utilise la question des FDLR comme prétexte militaire pour intervenir au Congo, piller ses ressources et installer ses relais politiques.
Ce flou est dangereux. Il crée une brèche diplomatique que Kigali exploitera sans scrupule. Le Rwanda pourra demain justifier une nouvelle invasion, arguant que la RDC elle-même a reconnu la menace FDLR, et que Kinshasa n’a pas su les neutraliser.
Une diplomatie qui joue contre elle-même
Le drame dans tout cela, c’est que la RDC ne semble même pas mesurer la portée de ce qu’elle vient de signer. Aucun audit de sécurité, aucun mécanisme de vérification internationale, aucun veto parlementaire. L’État congolais a signé dans une improvisation totale, exposant toute une nation à un nouvel engrenage de guerre.
C’est une diplomatie suicidaire, sans mémoire, sans vision. Elle trahit les victimes de l’Est, les déplacés des camps, les soldats tombés au front. Elle ne protège rien. Elle ne résiste à rien. Elle légitime même les justifications de ses bourreaux.
Un accord pour la paix ou une manœuvre électorale ?
Tout cela intervient dans un contexte très particulier : la campagne électorale américaine. Donald Trump, en quête de victoires diplomatiques à brandir devant son électorat, s’est offert un « accord africain » sans coût ni résistance. Washington sort gagnant, Kigali sort stratège, et Kinshasa… s’applaudit d’avoir été humiliée.
Au lieu d’imposer un langage de vérité et de dignité, la RDC s’est laissée manipuler. Elle s’est prosternée devant ses oppresseurs. Et elle en sort avec un traité qui ne changera rien pour le peuple, mais qui peut tout changer pour ses ennemis.
Conclusion : Le Congo a besoin d’un État, pas d’un décor
Le drame congolais n’est pas seulement militaire. Il est structurel. Il est mental. Il est dans cette incapacité à construire une diplomatie forte, cohérente, alignée avec les intérêts vitaux du pays. Tant que l’élite congolaise se contentera de signer ce qu’on lui présente, sans contre-propositions, sans étude, sans résistance, la RDC ne sera qu’un terrain de manœuvre pour les autres.
La paix ne s’obtient pas dans les salons de Washington quand elle est dictée par les puissances étrangères. La paix s’impose quand un peuple se lève, rappelle sa dignité, et refuse l’injustice, même lorsqu’elle vient enveloppée d’un drapeau américain.
Aujourd’hui, la RDC s’est trahie. Et demain, ce traité pourra servir de justificatif légal pour toutes les formes d’ingérence sur son territoire.
Il ne faut pas attendre que l’histoire juge. Il faut que le peuple se souvienne.