RDC : Prévenir l’explosion sociale avant qu’il ne soit trop tard

(Par Jonas Tshiombela, Avocat du peuple)
Kinshasa, 29 septembre 2025. Dans un contexte où la République Démocratique du Congo traverse une phase charnière de son histoire, le gouvernement doit impérativement ouvrir les yeux sur la réalité quotidienne de sa population. Les signaux d’alerte sont visibles et palpables. Les ménages suffoquent, les fonctionnaires se découragent, les jeunes désespèrent, et la patience du citoyen congolais s’épuise à une vitesse inquiétante.
Plusieurs fronts fragilisent la cohésion nationale : Le contrôle technique des véhicules et conditions de délivrance des permis de conduire sont légitimes en théorie, mais deviennent une épreuve financière insoutenable pour un peuple déjà écrasé par la misère. À cela s’ajoute la pression pour la délivrance des permis de conduire des chauffeurs, qui alimente un climat de tension dans un secteur vital pour l’économie et la mobilité urbaine. La baisse du dollar par rapport au franc congolais, au lieu de soulager, entraîne une flambée des prix des biens et services. Pire encore, plusieurs produits de première nécessité comme les produits pétroliers, la farine, le riz, le poulet ou encore les tomates n’ont connu aucune amélioration dans leur structure de prix. Cette distorsion alimente la colère populaire et fragilise la confiance envers les mesures économiques annoncées. À l’Est, la guerre perdure, semant la mort et le désespoir, tandis qu’au centre et dans la capitale, les embouteillages paralysent l’économie urbaine. La rentrée scolaire se transforme en calvaire pour les parents qui n’ont plus les moyens de scolariser dignement leurs enfants. Les salaires des fonctionnaires, déjà faibles, sont rongés par l’inflation et ne permettent plus de vivre, mais seulement de survivre. Ces réalités cumulées constituent une bombe sociale à retardement. Maintenir la pression sur un peuple sans lui donner les moyens vitaux de résister à la pauvreté et de défendre son avenir est un pari dangereux. L’histoire du monde nous enseigne que les explosions sociales naissent moins des discours politiques que de la faim, du désespoir et du sentiment d’abandon. Le gouvernement congolais doit donc agir sans délai. Il est temps de revoir le programme national de gouvernance et de l’adapter à la dure réalité sociale. Les priorités doivent être réajustées :
1. soulager le panier de la ménagère,
2. garantir des salaires décents,
3. encadrer les réformes de contrôle technique, de délivrance des permis de conduire et autres obligations administratives sans les transformer en pièges financiers,
4. investir dans la mobilité urbaine et les infrastructures scolaires, et surtout, restaurer la confiance des citoyens dans leurs institutions.
Ignorer ces signaux, c’est offrir aux ennemis de la RDC une opportunité inespérée d’exploiter le désarroi populaire pour des fins inavouées. L’heure n’est plus aux slogans ni aux effets d’annonce. L’heure est à la lucidité, à l’écoute et à la décision courageuse. Comme le rappelle une sagesse africaine : «mieux vaut prévenir que guérir». Le temps d’agir, c’est maintenant.
Affaire Minerais-Infrastructures : les USA invités à emboîter le pas à la Chine !
L'affirmation est de Bamada.net sous le titre *"Le Congo ne vendra pas ses ressources minérales aux États-Unis, déclare le président FATSHI"* paru le 23 septembre 2025 avec pour source identifiée Reuters
Selon l'auteur, « Malgré son soutien à la médiation américaine, cela ne signifie pas que nous allons vendre aux enchères nos ressources minérales », a déclaré Tshisekedi aux journalistes à New York. « Nous allons, dans le cadre de ce partenariat, travailler au développement des secteurs miniers, au développement de la chaîne de valeur, au développement des infrastructures avec un accent particulier sur l’énergie », a-t-il déclaré. Tshisekedi a indiqué que le pays avait signé un partenariat stratégique avec la Chine. « Aujourd’hui, nous négocions un partenariat similaire avec les États-Unis. Nous espérons le mener à bien », a-t-il déclaré. L'auteur souligne que "l’Administration Trump s’est déclarée désireuse de mettre fin aux combats qui ont fait des milliers de morts cette année et d’attirer des milliards de dollars d’investissements occidentaux dans une région riche en tantale, or, cobalt, cuivre et lithium. La date limite pour la mise en œuvre d’une partie de l’accord américain est ce mois-ci".
Ils se comptent par les doigts de la main
Ainsi, l'information principale est que Félix Tshisekedi s'est appuyé sur le contrat sino-congolais pour faire valoir le deal minier avec les Américains. Il est effectivement établi que c'est au travers du contrat sino-congolais que la RDC se dote depuis 2008 d'infrastructures économiques et sociales dans plusieurs domaines, entre autres les voies de communication, la santé, l'éducation, l'eau, l'électricité etc. Aujourd'hui, par exemple, c'est par contrat amendé via l'Avenant n°5 en 2024 que le Congo a ses premières rocades à Kinshasa.
C'est vrai qu'en 2007, lors de la présentation de ce programme au Congrès réunissant l'Assemblée nationale et le Sénat, Joseph Kabila avait convié les autres partenaires à s'en inspirer dans l'objectif bien précis de booster la reconstruction nationale. Hélas ! pour des raisons plutôt politiciennes que politiques, la formule "minerais en contrepartie des infrastructures" avait été combattue par les partenaires extérieurs Occidentaux.
On se rappelle de la campagne entreprise contre ce contrat par la Belgique. Son ministre des Affaires étrangères Karel de Gutch s'était personnellement rendu à Beijing pour dissuader la Chine d'accepter ce type de troc "interdit" dans les systèmes économiques modernes.
On se rappelle également de la campagne menée par l'IGF sous la gestion de Jules Alingete, mis entre 2021 et 2023 sous pression américaine pour le casser. Preuve qu’entre 2007 et 2023, Américains et Européens n'en voulaient pas !
Le constat fait par des observateurs pragmatiques est que tout en poussant Félix Tshisekedi à tourner le dos aux Chinois, les Occidentaux ne lui ont pas apporté des solutions pragmatiques.
Sous son premier mandat, il a reçu soit au pays, soit à l'étranger des investisseurs américains et européens. Rebelote depuis son second mandat : ils se comptent par les doigts de la main, ceux des investisseurs occidentaux à se manifester. En témoignent les zones économiques spéciales. Elles ont un taux de remplissage qui ne dépassent pas 25 %.
Choisir entre le peu qu'on vous donne et le trop qu'on vous promet
Les Congolais ont été habitués à des entreprises économiques et, à la fois, ‘’sociales’’. Les grosses unités industrielles héritées de la colonisation fonctionnaient ainsi. Aux côtés de la production industrielle, il y avait des cités résidentielles, des écoles, des centres médicaux, des marchés, des aires sportives, des centres culturels, des routes de desserte agricole, etc.
C'est ce qui faisait la force de la Gécamines (UMHK) au Katanga, de la Miba au Kasaï, des Plantations Unilever au Kwilu, de la Cimenterie de Lukala au Kongo Central etc. jusqu'à ce que vienne l'estocade avec le fameux PAS (Programle d'Ajustement Structurel) qui s'est révélé globalement catastrophique pour les économies des pays en voie de développement.
Le binôme "Entreprise-Cité résidentielle" n'a pas été totalement éliminé. La formule "Ressources naturelles en contrepartie des infrastructures de base" est tout ce qu'il y a d'incontournable, surtout pour des États comme la RDC *plus à construire qu'à reconstruire*, des États qui, à défaut d'avoir du liquide pour financer leurs infrastructures, ont des minéraux, des végétaux, des hydrocarbures etc. qui intéressent des preneurs.
Pari pris et relevé par la Chine en s'intéressant aux minerais de la RDC "mis en jachères" par les Occidentaux dans la foulée de la Perestroïka.
Et comme l'affirment les connaisseurs, les Américains et les Européens ont exploité de façon industrielle les minerais congolais entre 1925 et 1990, tandis que les Chinois n'y opèrent que depuis 2015, avec la *première cathode de cuivre produite par la SICOMINES S.A. (SCM)*, sept ans après le démarrage du financement des premières infrastructures en 2008.
Tous les observateurs le savent : la Chine détient à elle seule 60 % de l'exploitation minière dans l'ensemble du Katanga.
Pourquoi et comment ? Aucune preuve ne pourra être produite du refus des autorités congolaises de ces 25 dernières années d'accorder des permis d'exploration ou d'exploitation des minerais du Congo aux investisseurs Occidentaux.
Si on peut reprocher au régime Kabila d'avoir ouvert les mines congolaises aux Chinois - encore que la formule "Minerais en contrepartie des Infrastructures" avait été proposée initialement à l'axe Bruxelles-Washington qui n'en avait pas voulu, peut-on reprocher au régime Tshisekedi d'avoir éconduit un seul investisseur Occidental ? Au contraire !
Au cours de ces sept années de son mandat, le Président de la République n'a eu de cesse de multiplier des initiatives pour s'attirer la sympathie des opérateurs américains et européens, tous domaines confondus.
Hélas, ils ne viennent ; continuant d'hésiter pour mille et une raisons.
La morale à tirer est que le chef de l'État est appelé à choisir entre le peu qu'on lui donne (peut-être les Chinois) et le trop qu'on lui promet (certainement par les Occidentaux). Entre-temps, c'est grâce à ce peu-là qu'on peut avoir des réalisations visibles que le trop avec ses réalisations en mirages ! C'est par ce peu-là qu'on peut brandir un bilan...
CP
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