Proposition d'amendements pour la nouvelle promulgation de la loi organique n°08/016 du 07 octobre 2008 portant composition, organisation et fonctionnement des Entités Territoriales Décentralisées et leurs rapports avec l'Etat et les Provinces

Lettre ouverte à l’Honorable Président de l’Assemblée Nationale
Honorable Président, Monsieur Vital KAMERHE,
Je me permets de vous adresser ce message par le biais de la presse, car c’est le seul moyen dont je dispose pour vous atteindre. Je vous prie de bien vouloir excuser ce choix, qui pourrait vous sembler inapproprié.
En tant que patriote profondément attaché à notre République et à ses entités territoriales décentralisées, je souhaite vous faire part des raisons qui motivent ma proposition d’amendement à la loi organique n° 08/016 du 7 octobre 2008, relative à la composition, à l’organisation et au fonctionnement des Entités Territoriales Décentralisées, ainsi qu’à leurs relations avec l’État et les Provinces.
Bien que je ne sois pas député et ne puisse donc pas initier une telle procédure, je suis un citoyen engagé, désireux de contribuer à l’amélioration de cette loi. Mon objectif est de permettre aux élus locaux de disposer des ressources nécessaires pour agir dès le début de leurs mandats électifs, une situation qui contraste avec ce que nous observons depuis les élections générales de décembre 2023.
Dans un avenir proche, je prévois de proposer une version amendée de la loi et je serais heureux de la partager avec vous ainsi qu’avec les honorables députés concernés, si cela vous intéresse. Cependant, je souhaite d’abord vous exposer les motifs de l’amendement afin d’obtenir votre avis.
Je vous souhaite une bonne lecture et j’espère que vos réflexions pourront contribuer à rouvrir le débat parlementaire sur ce sujet.
Je vous remercie pour votre attention et vous prie d’agréer, Honorable Président, l’expression de mes salutations patriotiques.
David MENGE
Conseiller municipal honoraire de la ville d’Ivry-sur-Seine (France)
Proposition d'amendements pour la nouvelle promulgation de la loi organique.
Exposé des motifs
“Toute loi doit impérativement évoluer et s’adapter aux conditions contemporaines.”
Dans un monde en constante évolution, la gouvernance locale se révèle être un pilier fondamental pour le développement harmonieux d’un pays. En effet, la loi organique n° 08/016 du 7 octobre 2008, qui régit la composition, l’organisation et le fonctionnement des Entités Territoriales Décentralisées (ETD) en République Démocratique du Congo, a été conçue avec l’ambition de renforcer la décentralisation et d’assurer une meilleure représentativité des élus locaux. Cependant, les obstacles rencontrés par la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI) dans l’organisation des élections des maires et des bourgmestres révèlent la rigidité dans la loi actuelle.
Les retards dans l'installation des exécutifs locaux, observés depuis les élections générales de décembre 2023, soulignent l'urgence d'une révision de cette loi. Il incombe aux législateurs de permettre aux assemblées territoriales d'organiser elles-mêmes les élections de leurs exécutifs, afin d'assurer une gouvernance réactive et en adéquation avec les attentes des citoyens. Ce modèle d'organisation politique a fait ses preuves dans de nombreux pays francophones dont la RDC est membre. Pourquoi cette option politique ne serait-il pas possible en RDC ? En effet, ce besoin de réforme dépasse le cadre administratif ; il s'agit d'une démarche essentielle pour restaurer la confiance des électeurs et renforcer la légitimité des institutions locales.
La décentralisation ne doit pas être un concept théorique, mais bien une réalité vécue par chaque citoyen. Les élus locaux, en tant que représentants directs de la population, sont les mieux placés pour répondre aux besoins spécifiques de leurs entités territoriales. En adaptant la loi organique et en révisant la loi électorale, la RDC aura là l'opportunité de créer un cadre législatif qui favorise une véritable participation citoyenne et une gouvernance locale efficace.
Cet exposé des motifs vise à éclairer les enjeux liés à la révision de la loi organique n° 08/016, en mettant en avant les bénéfices d'une telle démarche pour l'ensemble de la société congolaise. Unis, engageons-nous dans un dialogue constructif pour bâtir un avenir où chaque voix compte et où chaque élu peut agir, à son niveau, en toute légitimité pour le bien-être des Congolais.
Les défis financiers auxquels la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI) est confrontée de manière récurrente pour organiser les élections des maires et des bourgmestres, aggravés par la guerre qui sévit à l'Est, soulignent l'urgence de réviser la loi organique n° 08/016 du 7 octobre 2008. Une telle révision est essentielle pour permettre une plus grande participation des citoyens à la vie démocratique. En effet, cette loi, qui régit l'organisation et le fonctionnement des Entités Territoriales Décentralisées (ETD) et a servi de fondement à l'élaboration de la loi électorale, a centralisé la gestion de ces élections, ce qui pose problème dans le contexte actuel.
Les retards dans l'installation des exécutifs locaux, suite aux élections générales de décembre 2023, a pour effet de réduire considérablement la durée de l'exercice complet de leur mandat. Cette situation nécessite une révision de deux lois fondamentales : la loi organique et la loi électorale. Une telle révision permettrait aux élus d'organiser eux-mêmes les élections des exécutifs locaux au sein de leurs assemblées territoriales. L'autonomie ainsi accordée viserait à faciliter l'installation des exécutifs locaux et à permettre un démarrage rapide des mandats. L’initiative ainsi prise renforcerait la responsabilité des élus locaux dans leur gestion d’une part et constituerait une première dans l'histoire de notre démocratie en réduisant les coûts financiers y afférents d’autre part.
En décentralisant cette responsabilité, les assemblées territoriales pourraient adapter les processus électoraux aux réalités locales, ce qui favoriserait une participation accrue des électeurs et une meilleure prise en compte des spécificités régionales. Cette démarche citoyenne s’inscrit naturellement dans le cadre du travail législatif du parlement. Par ailleurs, une telle révision pourrait renforcer la transparence et la crédibilité des élections en permettant une supervision plus directe et un contrôle citoyen du processus électoral. Par conséquent, nul besoin d’attendre les prochaines échéances électorales pour s’atteler à la résolution de ce problème mais bien profiter des difficultés actuelles pour ouvrir le débat afin de proposer des solutions adaptées à la réalité du moment.
Les élus locaux, étant généralement plus en phase avec les attentes de leurs concitoyens, sont souvent en meilleure position pour établir des mécanismes répondant aux besoins et préoccupations de la population. Il nous semble donc important que les décideurs politiques puissent prendre en considération ces enjeux et engager un dialogue constructif avec tous les acteurs concernés, y compris ceux de la société civile. Cela permettra de réformer la loi organique et la loi électorale afin de favoriser une véritable décentralisation. Ces évolutions dans nos pratiques électorales contribueront ainsi à apaiser les tensions politiques et à renforcer la confiance des citoyens envers leurs institutions locales. À l’inverse, si cette révision des lois n’est pas rendue possible, cela enverra un mauvais signal aux électeurs pour les prochaines élections. Ils risqueraient alors de se désengager, faute d’un changement politique efficace et d’un réel dynamisme dans la gouvernance locale.
Notre réflexion sur cette loi vise à identifier les faiblesses du système actuel et à proposer des solutions concrètes d’amélioration afin que les élus issus des élections générales respectent la législation en vigueur et organisent, dans les délais fixés, les élections des exécutifs locaux. Cette démarche simple et pragmatique, qui ne requiert pas nécessairement de moyens financiers ou humains importants, constitue la seule approche efficace pour permettre aux ETD d’accomplir leur mission dans le délai de leur mandat électif.
En effet, la loi organique adoptée en 2008 présentait déjà des insuffisances avant même sa mise en application partielle. Depuis sa promulgation, et ce jusqu’en 2023, trois cycles électoraux se sont succédé sans qu’aucune élection municipale ou locale n’ait été organisée. La non-application des lois en République Démocratique du Congo (RDC) engendre une inertie politique, à l’origine de nombreux dysfonctionnements structurels de l’État. Le poids excessif des individus dans la prise de décisions, ainsi que la lourdeur de l’administration publique, constituent de sérieux obstacles au fonctionnement normal des institutions, ce qui freine également la mise en œuvre des directives essentielles au bon fonctionnement de l’État
En décembre 2023, pour la première fois depuis des décennies, des élections municipales et locales ont été organisées, à la grande satisfaction des citoyens affichant une préférence pour des autorités élues plutôt que nommées, comme il est de coutume dans la culture politique en RDC. Depuis janvier 2024, les ETD disposent d'élus confrontés aux problèmes évoqués : la lourdeur administrative et le poids des individus dans la prise de décisions. Les élus locaux ont déjà entamé plusieurs mois de leur mandat sans exercer le pouvoir. Les conseillers urbains ou communaux élus sont sans moyens, et les exécutifs ne sont pas élus malgré les promesses de la CENI, elle-même confrontée à des problèmes budgétaires auxquels le gouvernement ne parvient pas à répondre. En raison des ambiguïtés de la loi organique, les maires et les bourgmestres nommés continuent de gérer les villes et communes, sous l'œil complaisant de l'administration étatique, ignorant les élections de décembre 2023.
Face à cette inertie politique persistante, on peut s'interroger sur la finalité des lois en RDC. De toute évidence, tout le monde sait que sans lois, aucun groupe humain, quel que soit son nombre ou ses objectifs, ne peut subsister. La vie d'un groupe suppose discipline et observance des règles et des lois au sens large. Les responsables de l'application des lois en RDC doivent se souvenir de ce principe. Penser à l'intérêt du pays en se libérant du poids de la culture politique congolaise et de certains dogmes permettrait de construire un avenir meilleur et d'inspirer les citoyens dans une dynamique continue. En réalité, les ambiguïtés de la loi organique nécessitent une modification pour permettre aux ETD, ciment de la cohésion sociale, de fonctionner sans discontinuité, quelle que soit l'alternance politique.
Dans un contexte où le banditisme urbain alimente l'insécurité dans les agglomérations et où la guerre à l'Est pousse les populations à l'exode, les ETD apparaissent comme un pôle de stabilité et un atout majeur dans la réorganisation de la société congolaise. Il est nécessaire que les autorités sortent de l'absurdité bureaucratique et que l'esprit des lois guide leurs actions politiques pour le bien-être de tous. Il n'est pas acceptable que les élus locaux mandatés par le peuple ne soient pas suffisamment écoutés, bien qu'ils soient placés au bas de l'échelle des élus. Un tel comportement affaiblit la République et va à l'encontre de l'esprit du législateur concernant la décentralisation. Adapter la loi organique aux objectifs de la décentralisation évite l'inertie politique post-électorale.
Cette adaptation doit s'accompagner d'une révision partielle de la loi électorale. Par exemple, on pourrait confier à la CENI l'organisation des élections municipales et locales, uniquement pour les élections des conseillers, mais pas celle des maires et bourgmestres. De même, le maire ou le bourgmestre ne pourra plus nommer les échevins, comme le prévoit actuellement la loi. Ces derniers seront élus par leurs pairs au sein du conseil urbain ou communal au même titre que le maire et son adjoint. Cette simplification de la procédure électorale permettra de gagner du temps, de faciliter l'installation des exécutifs locaux et de réaliser des économies substantielles sur le financement des élections.
Il est également essentiel de libérer les ETD de la tutelle du gouverneur de province. Ces entités seront, par nécessité de proximité, placées sous la responsabilité de l’administrateur du territoire. Celui-ci aura pour mission de gérer et de répartir les dotations ainsi que les subventions de l’État à l’échelle locale, tout en effectuant un contrôle de la légalité des actes des collectivités territoriales. De plus, la cohabitation du maire ou du bourgmestre avec le président du conseil dans une même ville ou commune risque de générer un conflit de légitimité politique et, par conséquent, de perturber le fonctionnement des ETD. Il serait donc judicieux de supprimer le poste de président du conseil urbain ou communal, afin de permettre au maire ou au bourgmestre, avec sa majorité politique, de gérer les institutions de l’ETD. Enfin, nous proposons que les candidatures pour l’élection du maire, du bourgmestre et des échevins proviennent uniquement de l’intérieur du conseil, et non de l’extérieur.
En conclusion, nous pensons que la révision de la loi organique n° 08/016 est non seulement nécessaire, mais urgente pour garantir une gouvernance locale efficace et réactive en République Démocratique du Congo. Les défis actuels, exacerbés par des retards dans l'installation des exécutifs locaux et des problèmes financiers, soulignent l'importance d'une décentralisation véritable qui permette aux Entités Territoriales Décentralisées (ETD) de fonctionner de manière autonome et en adéquation avec les besoins des citoyens. En adaptant le cadre législatif, nous avons l'opportunité de renforcer la légitimité des élus locaux, d'améliorer la participation citoyenne et de restaurer la confiance envers les institutions. Il est essentiel que les décideurs politiques s'engagent dans un dialogue constructif pour mettre en œuvre ces réformes, afin de bâtir un avenir où chaque voix compte et où la gouvernance locale est véritablement au service du bien-être des citoyens Congolais.
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