A l’initiative de l’article 71b consacrant l’obligation de sa démarche, RDC : Alain Lubamba insiste sur la participation réelle des Congolais dans le capital des sociétés minières

Député National honoraire et ancien Vice-ministre aux Budget et aux Affaires étrangères, Alain Lubamba demeure l'un des artisans de la réforme du Code minier de 2018. Défenseur acharné de la souveraineté permanente de l'État et du peuple congolais sur leurs ressources naturelles, il est à l'origine de l'article 71 bis qui consacre l'obligation, pour les sociétés minières à grande échelle, d'inclure dans leur capital au moins 10% d'actionnaires congolais. Pour lui, cette disposition, saluée à l'époque comme un pas décisif vers une meilleure appropriation nationale du secteur minier, peine aujourd'hui à produire ses effets, faute de mécanisme rigoureux de contrôle et de sanctions. Alain Lubamba plaide dès lors pour la mise en place d'un système combinant mesures préventives, sanctions sévères contre les fraudeurs et encadrement juridique clair afin de lutter contre les prête-noms et garantir une véritable participation des Congolais à la création de richesses. Tout en appelant à renforcer l'arsenal juridique et institutionnel pour corriger ces dérives, l'ancien Député souligne également la nécessité, pour la République Démocratique du Congo, de capitaliser sur les opportunités des partenariats internationaux notamment, à travers l'accord RDC-USA, qu'il considère comme un levier stratégique pour l'industrialisation et le transfert de technologies. Il revient à la charge et insiste sur sa démarche en ce moment particulier des discussions avec les USA sur un accord minier en gestation. Il répond à quelques questions avec un peu plus de lumière à ce sujet.
Q1/ Député National lors de la législature 2011-2018, vous êtes l'initiateur de l'article obligeant dans le Code minier les sociétés minières à grande échelle à inclure des actionnaires congolais représentant au moins 10% de leur capital social. Voudriez-vous nous rappeler les raisons qui vous avez poussé à soutenir cette disposition ?
Défenseur de la souveraineté permanente de l'Etat et du peuple congolais sur ses ressources naturelles, principe fondamental, inscrit à la fois dans la Constitution en son article 9 et inspiré par la Résolution 1803 de l'Assemblée Générale des Nations Unies adoptée le 14 décembre 1962, dans le cadre de la réforme du code minier en 2018, nous avions initié, défendu et fait adopté l'article 71 bis qui dispose sur la participation des personnes physiques de nationalité congolaise au capital des sociétés minières, en tant que Représentant du peuple à l'époque principalement pour :
- Renforcer la participation des Congolais dans le secteur minier ;
- Promouvoir l’appropriation nationale des revenus et des décisions liées aux activités minières ;
- Favoriser la création de richesses nationales ;
- Lutter contre l’extraversion économique, qui laisse une part trop importante des bénéfices aux investisseurs étrangers.
- Rééquilibrer le rapport de force face aux investisseurs étrangers
Q2/ Cette initiative était largement saluée, comme un pas important vers une meilleure inclusion économique des Congolais dans les secteurs stratégiques du pays. Où en sommes-nous à ce jour quant à l'exécution de cette disposition ?
A ma connaissance cette disposition est presque vidée de sa substance à cause des mécanismes de prête-nom, autrement dit des actionnaires congolais fictifs, sans pouvoir réel.
Q3/ Que faut-il pour faire respecter cette mesure ?
Pour que la mesure ait un effet concret, il faut prévoir à la fois des mécanismes de contrôle préventifs et des sanctions dissuasives. Les pistes que nous avons toujours proposées consiste à prendre de :
1. Mesures préventives et de contrôle :
- L’obligation pour les actionnaires congolais de déclarer qu’ils n’agissent pas comme des prête-noms, sous peine de poursuites pénales en cas de fausse déclaration.
- L'obligation de publier la liste des actionnaires dans un Registre Public accessible ;
- L’encadrement juridique des pactes d’actionnaires qui interdisent des clauses occultes transférant les droits économiques au partenaire étranger. Ici, il est question de compléter le Code minier et le Règlement minier par des textes l'application qui définissent et criminalisent la pratique de prête-nom.
2. Mesures répressives et sanctions financières ainsi qu'administratives. Il s'agit de :
- Faire payer des amendes lourdes pour les sociétés minières et les actionnaires fictifs, allant jusqu’au saisie des parts fictives au profit de l’État ou d’un fonds souverain ;
- Suspendre ou retirer le permis d’exploitation en cas de fraude avérée ;
- Enfin des sanctions pénales, notamment des poursuites judiciaires pour fraude, fausse déclaration ou corruption.
En bref, il faut un système combinant contrôle rigoureux de l’authenticité de l’actionnariat, sanctions sévères contre les fraudeurs et mécanismes incitatifs pour encourager la participation réelle des citoyens Congolais.
Q4/ Quel est votre avis sur le deal RDC-USA ?
Selon moi, la RDC, riche en minerais critiques, doit tirer pleinement profit du deal RDC–USA en adoptant une stratégie d’intégration en amont et en utilisant les mécanismes des ADPIC (Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle liés au commerce), dont les États-Unis d'Amérique sont aussi membres. Plutôt que de se limiter à l’exportation de matières premières, la RDC doit participer à la transformation, au traitement et au développement technologique lié aux minerais.
En terme clair : Grâce aux ADPIC qui sont un accord de l'Organisation Mondiale du Commerce, la RDC, en tant que pays producteur de minerais essentiels, doit négocier pour obtenir non seulement des revenus directs (royalties, taxes), mais aussi un transfert de technologie, un développement de compétences locales et surtout une part des bénéfices générés par les innovations et l'industrialisation en aval, qui sont protégées par des droits de propriété intellectuelle.
Voilà la meilleure Stratégie pour la RDC afin de tirer durablement partie du deal minier avec les USA.
En adoptant une approche proactive et stratégique axée sur l'intégration en amont et l'exploitation judicieuse des mécanismes liés aux ADPIC, la RDC va transformer le simple deal d'extraction de ressources en un véritable levier de développement économique durable, en créant de la valeur ajoutée sur son territoire national et en renforçant ses capacités industrielles et technologiques et surtout j'insiste en tirant bénéfices générées par des innovations issues des minerais stratégiques indispensables à la sécurité internationale, au développement technologique ou à la transition énergétique.
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