4 janvier 1959 : Martyrs de l’indépendance, prix à payer pour une indépendance politique

Le 4 janvier de chaque année, la République Démocratique du Congo commémore ses martyrs, ces héros qui ont payé le prix ultime pour l'indépendance. Cette date, avec beaucoup d'émotions et de souvenirs, évoque les émeutes de Léopoldville survenues en 1959, c’est-à-dire, un soulèvement populaire contre les colons belges. Un moment qui marqua un grand tournant dans la lutte pour l'émancipation des Congolais face à la domination coloniale belge.
Ces événements violents, déclenchés par l'interdiction d'un rassemblement politique, sont devenus un symbole de la résistance et de la quête de liberté.
Un désir d’autonomie face aux puissances coloniales souffle sur le continent africain, notamment au Congo belge. Les émeutes de janvier 1959 ne sont pas simplement un chapitre de l'histoire congolaise, mais plutôt une démonstration palpable des aspirations profondément enracinées d'un peuple désireux d'écrire son propre destin. Face à un paysage politique en ébullition, au sein duquel des partis tels que l'Alliance des Bakongo (ABAKO) de Joseph Kasa-Vubu et le Mouvement National Congolais (MNC) de Patrice Lumumba rivalisent pour le cœur des Congolais, le climat d'exploitation est à son paroxysme.
Le rassemblement organisé par Kasa-Vubu, prévu pour le 4 janvier, devait être un moment de communion et de revendication. Mais cette volonté de s'exprimer librement s'est heurtée à la répression brutale des autorités coloniales.
Lorsque Kasa-Vubu et ses camarades, au lieu de s'adresser à une assemblée enthousiaste, se retrouvent face à une foule décidée à manifester, une spirale de violence éclate, transformant des aspirations pacifiques en tumulte. Les rues de Léopoldville, actuellement Kinshasa, voient se rassembler une foule de près de 35 000 âmes, unie par une colère légitime contre une autorité qui a décidé d'interdire un droit fondamental, celui de se rassembler.
L'absence de dialogue entre les Congolais et les colonisateurs belges plonge les deux parties dans une confrontation désespérée, irrémédiablement marquée par la brutalité.
Ce jour-là, le désespoir des « sans voix » s'est transformé en révolte, prenant structures coloniales et des policiers pour cibles. Ce qui devait être un rassemblement pacifique s'est mué en violences inouïes, des vitrines brisées, des églises incendiées et des prêtres molestés. Cette déferlante indignation, alimentée par des années de frustrations et d'inégalités, aurait pu n’être que le reflet d’un déchirement social, mais elle se transforme en une revendication essentielle pour l'autodétermination des Congolais.
En réaction à ces événements, les autorités coloniales ne tardent pas à procéder à des arrestations massives, y compris celle de Kasa-Vubu, tissant ainsi les liens entre la répression et l’émergence des leaders de la lutte pour l’indépendance.
Sur le plan humain, le bilan des émeutes reste flou, entre 49 et 500 victimes, mais ce qui demeure indéniable, c’est que cette tragédie a laissé une empreinte indélébile dans la conscience collective du peuple congolais. Chaque vie perdue est désormais honorée comme un martyr du combat pour la liberté, et la journée du 4 janvier est officialisée en tant que Journée des Martyrs, un hommage poignant à ceux qui ont sacrifié leur existence pour faire entendre la voix de leur peuple. Le souvenir de ces événements devient une pierre angulaire de la mémoire nationale et de l'identité congolaise.
Les conséquences des émeutes s'étendent bien au-delà de leur déroulement, suscitant une série de réformes au sein de l'administration belge, coincée entre l'indifférence de la métropole et les réalités du terrain. Les événements de janvier anticipent une prise de conscience accrue du besoin d’un changement radical, forçant la colonisation à envisager des réformes sans précédent. La promesse d'élections en décembre 1959 devient ainsi une réponse bien tardive à un soulèvement trop longtemps étouffé.
Au-delà de cette dynamique de répression et de réformes, ces émeutes sont également le catalyseur d'une radicalisation du mouvement indépendantiste, propulsant le MNC de Patrice Lumumba au premier plan. Les révoltes galvanisent les masses, éveillant une conscience politique chez des Congolais de toutes les classes sociales, qui voient en cette lutte l'opportunité de s’affirmer en tant que nation. Ces transformations sont à la fois émancipatrices et inquiétantes ; car, cette quête de liberté semble provoquer un sentiment d'inquiétude parmi les colons, d'aucuns allant jusqu'à envisager des coups d'État comme ultime recours pour préserver leur pouvoir.
Le 4 janvier est désormais un symbole d'unité et de réveil, mais également un rappel des déchirements engendrés par la colonisation. Les événements de Léopoldville sont devenus une balise pour les générations futures, un appel à la fierté et à la résilience, révélant la puissance d'un peuple ayant décidé de s'ériger contre l'oppression. À mesure que les Congolais continuent d'honorer la mémoire de ces martyrs, ils donnent ainsi vie à un héritage qui demeure d'une pertinence poignante et d'une nécessité urgente dans la lutte continuelle pour la dignité, le respect et la justice.
César Nkangulu
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